Québec — Avec Les folies passagères, Maude Bergeron tente de briser les tabous liés à la sexualité, à l’apparence, à l’identité et à l’orientation sexuelle. Ses images diffusées sur les réseaux sociaux sont vraies, crues et rafraîchissantes. Le Carrefour a voulu en savoir davantage sur la jeune illustratrice de Québec
Par Marie-Claude Boileau
Quel est votre parcours professionnel?
J’ai étudié en Arts et en Cuisine professionnelle. J’ai d’ailleurs travaillé en cuisine de restauration avant de me lancer dans le travail autonome via mes deux projets : Cuisine estudiantine (un site de recettes végétariennes) et Les folies passagères.
Pour avoir choisi le métier d’illustratrice?
Je n’ai pas l’impression que c’est un choix que j’ai effectué d’une manière consciente, puisque la création de ce projet n’était pas dans un but professionnel à l’époque. Enfant, je souhaitais ardemment être autrice et illustratrice, mais je ne croyais pas qu’il s’agissait d’une possibilité. Finalement, à peine deux mois après la création de Les folies passagères, j’ai reçu un retour très positif et des demandes professionnelles. J’ai transformé peu à peu tout ça pour créer mon emploi actuel idéal.
Pourquoi avoir lancé Les folies passagères en 2016?
J’avais un réel besoin d’avoir un espace m’appartenant entièrement pour y partager mes textes, mon militantisme et mes dessins. Je souhaitais ouvrir un dialogue avec des personnes via les réseaux sociaux.
Quel est votre objectif avec Les folies passagères?
Je souhaite dans un premier temps, rejoindre les personnes marginalisées qui sont concernées par les sujets de mes publications, pour briser le cercle de solitude qu’elles peuvent vivre. Je souhaite valider leur vie, leur identité et leurs émotions, mais aussi offrir des messages qui se veulent rassurants. Pour moi, offrir une forme de soutien virtuel artistique et littéraire est une priorité.
Sinon, la seconde partie de mon objectif est la sensibilisation et le militantisme. Je m’adresse aussi aux personnes qui ne sont pas concernées dans le but de partager des informations pour détruire les préjugés et les oppressions.
Vous vous exprimez sur des sujets comme la santé mentale, la diversité corporelle, la sexualité, etc. Pourquoi?
Parce que ces sujets sont centraux dans les systèmes d’oppressions. Les personnes qui ne font pas partie des normes, tant en termes de santé, d’apparence, d’identité, d’orientation sexuelle ou autre, sont victimes d’injustices et n’ont pratiquement aucun espace positif dans les médias. Je souhaite détabouiser ces sujets pour qu’on puisse enfin effectuer des changements concrets.
Pourquoi abordez-vous ces sujets de manière franche, sans faux-fuyant avec des dessins vrais, honnêtes, explicites?
Parce que je considère que c’est le reflet exact de ce qui est vécu dans la réalité quotidienne des personnes concernées par ces sujets, alors qu’un effort collectif est mis pour taire et invisibiliser ces problématiques sociales. C’est primordial pour moi d’exposer tout sans tabous, d’une manière directe.
Qu’est-ce que ça vous apporte de discuter de ces sujets?
Personnellement, ça m’apporte beaucoup. Je suis contente de pouvoir cheminer avec les belles personnes qui me suivent au rythme de mes publications. Je ne suis pas capable de concevoir mon quotidien sans une part de militantisme. Je suis révoltée par les injustices, et c’est vital pour moi de m’exprimer sur ces sujets.
Quels genres de réactions obtenez-vous?
D’une manière générale et quotidienne, je reçois des retours et messages très touchants et positifs. Comme j’aborde des sujets tabous d’une manière directe, les personnes semblent à l’aise de me confier des parties de leur propre vécu. Ça me touche beaucoup.
Sinon, je reçois aussi de nombreux messages haineux et violents de personnes qui sont anti féministes/raciste/sexiste/transphobe/etc. J’ai d’ailleurs une politique de gestion très stricte et je bloque/supprime tout ce qui est irrespectueux et peut porter atteinte à autrui.
Est-ce que c’est difficile d’aborder ces sujets qui sont tabous, difficiles pour certains?
Pour moi ce n’est pas difficile, mais d’une manière générale c’est terriblement ardu pour une majorité de personnes. Les préjugés sont forts et puissants, et plusieurs ne s’en détachent pas. Plus on en parle, plus ce sera facile d’en parler.
Voyez-vous que ça touche des gens?
Oui, je reçois beaucoup de messages de personnes qui mentionnent être touchées par ce que je fais. C’est merveilleux pour moi de lire ces messages, comme ça fait partie de mes priorités d’atteindre les personnes qui vivent des oppressions.
Peut-on voir vos illustrations ailleurs?
Elles sont publiées sur mes réseaux sociaux, Instagram et Facebook, ainsi que sur mes deux sites Web. J’ai une boutique en ligne sur laquelle je vend des choses, et sinon je réalise des contrats variés. Mes dessins ne sont actuellement pas exposés à un endroit précis.
Pouvez-vous me parler de Pamplemousse?
Il s’agit de mon premier roman graphique, que j’ai autopublié après de longues heures de travail. C’est un livre très percutant, qui contient des dessins en couleurs explicites. Les sujets abordés sont difficiles : détresse psychologique, consommation, rejet amoureux, entre autres. J’y expose une histoire éprouvante teintée par le sexisme et la psychophobie quotidiennes qui font des ravages.
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