Saint-Roch — La Bande Vidéo a mis la main sur un écran d’épingles, une version moderne d’un très rare appareil développé dans les années 30 pour produire des films d’animation. La nouvelle a d’ailleurs capté l’intérêt de plusieurs intervenants dans le monde.
Cet écran d’épingles, nommé L’Alpine – en référence au lieu d’origine de son créateur – s’ajoute aux deux seuls autres exemplaires de grand format fonctionnels dans le monde. L’un de ces appareil appartient à l’Office national du film du Canada et l’autre, au Centre national du cinéma et de l’image animée, en France.
L’écran d’épingles est un outil utilisé dans la production de films d’animation, développé conjointement par le graveur Alexandre Alexeieff et son épouse Claire Parker dans les années 1930. Il s’agit d’un cadre dans lequel sont enchâssées plusieurs centaines de milliers d’épingles mobiles. En repoussant plus ou moins les épingles à travers le cadre et avec un éclairage latéral, on produit des ombres en fonction de la saillie des épingles, faisant ainsi « chanter » les teintes veloutées de gris qui vont du noir profond au blanc pur. En modifiant successivement le dessin, dont l’aspect rappelle la gravure en mezzotinte, et en photographiant chaque changement image par image, il est possible de créer des films d’animation, rappelle la Bande Vidéo.
Rares et fragiles
Les appareils originaux sont très fragiles et difficilement transportables, indique SÉBASTIEN HUDON, directeur artistique pour La Bande Vidéo, en entretien téléphonique. Pour assurer la résistance des épingles, les concepteurs originaux avaient recours à de la cire d’abeille. Au fil du temps, celle-ci devient poussiéreuse. L’écran pouvait donc se salir. De plus, avant chaque usage, il fallait réchauffer l’écran pour ramollir la cire d’abeille, « un rituel assez fastidieux », ajoute-t-il.
L’écran d’épingles de la Bande Vidéo a été fabriqué par ALEXANDRE NOYER, un informaticien et passionné de cinéma d’animation basé à Annecy, en France. Les 200 000 (!) aiguilles utilisées pour cette version moderne sont d’un diamètre légèrement supérieur à celui des épingles originales, donc plus résistantes.
L’appareil se transporte également plus facilement même si la prudence s’impose toujours lors des déplacements. Il est aussi plus facile à manipuler et à entretenir. On peut « modeler » les épingles avec les doigts alors qu’un outil était requis pour déplacer celles des anciens modèles, explique M. Hudon. Un matériel plus moderne, le polyéthylène, a également remplacé la cire d’abeille pour assurer la friction des épingles.
La Bande Vidéo devrait recevoir son écran d’épingles au printemps 2021. L’appareil et la mallette de transport sont prêts. Une fois le confinement terminé, il faudra ensuite procéder au transport de l’écran de la France vers la ville de Québec et à son dédouanement.
Engouement
La nouvelle de l’acquisition de l’écran d’épingles a suscité l’enthousiasme. Des créateurs de plusieurs pays, dont la Russie, ont notamment approché l’organisme à propos du nouvel appareil. « C’est une technologie qui est très alléchante », lance Sébastien Hudon.
La venue de cet équipement risque d’ailleurs d’avoir un impact assez important sur le développement de la Bande Vidéo au fil des ans, explique-t-il, au niveau de la création, des activités de l’organisme et des résidences d’artistes.
« Peut-être que je suis trop enthousiaste mais la nouvelle de l’acquisition a été partagée à 10 000 reprises dans le monde. C’est énorme », lance le directeur artistique.
« C’est le Stradivarius de l’animation, enchaîne M. Hudon, en faisant référence aux célèbres violons fabriqués par le luthier Antonio Stradivari. C’est l’outil le plus convoité pour y travailler. C’est une légende auprès des animateurs. »
Clientèles
Une fois arrivé à la Bande Vidéo, le concepteur Alexandre Noyer formera le directeur technique de l’organisme quant à l’usage de l’appareil. Il y donnera également des classes de maître. L’Alpine sera accessible aux créateurs et cinéastes.
Une programmation de films réalisés avec l’écran d’épingles et une installation dans la galerie de la Bande Vidéo devraient être aussi au menu.
Sébastien Hudon entend toutefois en faire un usage plus large. Il souhaiterait en faire un outil d’art-thérapie ou de médiation culturelle. « L’écran d’épingles pourrait donner la capacité de s’exprimer à des gens qui n’en ont pas les moyens et leur faire découvrir un univers tactile », dit-il en citant par exemples des personnes autistes ou non-voyantes. Elle pourrait servir aussi à des personnes vivant avec diverses problématiques en santé mentale.
Il sera possible d’amener l’écran dans divers organismes sous la supervision d’un employé de la Bande Vidéo.
Pour des informations supplémentaires, visitez leur site Web.
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