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Tout ça pour un slogan

Le maire Régis Labeaume

« Vous savez, le maire, avoir les meilleurs, il aime ça », confie Suzanne Verreault. « Comme on lui avait dit que cet homme-là était le meilleur, il l’a engagé sans hésiter. » 

Par Gabriel Côté

Cet homme-là, c’est Clotaire Rapaille. 

Nous sommes en janvier 2010. Régis Labeaume cultive depuis un certain temps l’idée de doter sa ville d’une nouvelle signature. La « Vieille-Capitale », comme on l’appelait, ça ne faisait plus l’affaire.

« Chaque administration a des épisodes moins heureux, soupire Mme Verreault. Celui-là, c’en est un, c’est certain. » 

En quête d’une nouvelle image de marque

Afin donc de rajeunir l’image de la ville, Régis Labeaume engage Clotaire Rapaille, qu’on pense alors un spécialiste du marketing de renommée internationale. 

Si l’on en croit des témoins de l’évènement et les journaux de l’époque, il semble bel et bien que le charisme peu commun de cet individu a enfirouapé tout le monde.

Voici une photo récente de Clotaire Rapaille, trouvée sur son profil LinkedIn.

« Écoutez, ce n’est pas juste Régis Labeaume qui a été trompé », dit Julie Lemieux, qui était conseillère municipale au moment de l’affaire. « Ce gars-là (Clotaire Rapaille) était respecté par tous les grands intellectuels du Québec : il était passé à l’émission de Marie-France Bazzo, et tout le monde avait du respect pour lui ! »

Même le prudent François Bourque donnait la chance au coureur (non sans néanmoins manifester un certain scepticisme – c’est tout à son honneur). Dans un article du 3 février 2010, le chroniqueur du Soleil reconnaissait l’importance de trouver un « nouveau pitch de vente » pour Québec, en soulignant qu’aucune instance officielle n’utilisait la « Vieille-Capitale » pour vendre la ville. Bourque remarquait aussi que l’embauche d’un étranger pour trouver ce slogan augmentait le risque de tomber sur une phrase creuse. « Mais le risque en vaut la peine », écrivait-il. 

Puis, tout le monde a déchanté un peu lorsque Clotaire Rapaille a qualifié les gens de Québec de « névrosés sadomasochistes », qui se comparaient à Montréal pour se faire du mal. 

« C’est l’argent des citoyens pour se faire dire des niaiseries. Bien, je dis au maire : « Arrêtez ça immédiatement ! » », avait tonné M. Bussières au conseil municipal.

Malgré tout, Régis Labeaume n’a pas reculé tout de suite. C’est que les « niaiseries à Clotaire » avaient déjà coûté un certain prix.  

Il a fallu attendre qu’un journaliste du Soleil expose au grand jour les imprécisions et les exagérations se trouvant sur le curriculum vitae de l’expert pour que le maire mette fin à son contrat. 

L’accent d’Amérique 

Dans les mois qui ont suivi, la Ville a trouvé un nouveau slogan par ses propres moyens : Québec serait désormais « L’accent d’Amérique », et non plus la « Vieille-Capitale ». 

Mais il semble que ce slogan n’a jamais vraiment pris. Cette conversation avec une élue en témoigne.

– Avec le recul, sentez-vous que ça a pogné, ce nouveau slogan-là?

– Oui, j’ai vraiment l’impression que les citoyens se le sont appropriés. 

– Ah oui? 

– Oui, et ça représente bien Québec, l’accent… 

– … d’Amérique?

– Oui, c’est ça l’accent d’Amérique. Excusez-moi, ça m’a échappé un instant.

– Oh ça va, ne vous inquiétez pas. 

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