Alexia Oman, candidate dans Cap-aux-diamants, nous parle de ses motivations à faire de la politique municipale et nous explique selon elle le rôle de Transition Québec dans la course électorale, notamment au sujet de l’éducation citoyenne et de la lutte pour une justice climatique et sociale.
Parles-nous de toi Alexia Oman.
« Je suis née à Trois-Rivières et j’ai étudié en sciences humaines là-bas. Je suis impliquée depuis que je suis toute jeune. J’ai changée d’école en quatrième année, je venais d’arriver et j’ai été reconnu comme étant la personne la plus rassembleuse. C’est anecdotique, mais représentatif. Dans ma famille, il y a plusieurs femmes bienveillantes qui prennent soin des autres. Ce sont des figures que j’ai voulu reproduire dans ma vie.
Je suis tombée en amour avec la sociologie au Cégep. Je suis venue étudier au baccalauréat à l’Université Laval et je suis maintenant à la maitrise. Je m’intéresse à l’éducation à la coopération. Plus spécifiquement, je m’intéresse à un projet où les jeunes doivent essayer le modèle COOP. Ils apprennent comment fonctionner démocratiquement, travailler, collaborer avec les autres et développer des outils d’argumentation pour faire valoir leurs idées. »
Il y a donc une dimension très expérimentale dans ce que tu fais. Tu n’es jamais bien loin du politique, n’est-ce pas ?
« Oui ! J’ai coordonné aussi plusieurs projets sociaux par le passé, comme un projet de sensibilisation sur le consentement au Yukon. Ce qui me préoccupe, c’est comment tisser du lien social et le protéger, remettre les choses en question et développer le sens critique des gens.
J’ai rapidement été conscientisé par un paquet d’enjeux. Je pense que c’est cette lunette, soit de voir et de penser aux injustices, qui a contribué à ma vision aujourd’hui.
Des fois, c’est vraiment frustrant quand que tu as l’impression que les gens ne comprennent pas la valeur que tu accordes aux choses ou aux situations en particulier, par exemple aux femmes qui travaillent dans les CPE et qui militent en ce moment.
Je pense que ma vision des choses c’est de dire : la politique représentative c’est un peu nul, mais est-ce qu’on peut essayer de donner plus de place et de capacité d’action aux gens en décentralisant et en faisant en sorte qu’il y ait plus d’espace pour avoir de l’influence sur notre vie et notre communauté? »
Penses tu que le fait que les gens ne comprennent pas toujours tes valeurs est une question d’éducation ?
« Je pense que c’est important d’éduquer et ça fonctionne quand on se donne les outils pour avoir un esprit critique, mais aussi pour avoir les connaissances scientifiques. Ça fonctionne par l’éducation populaire et par la mise en place d’espaces où il y a une mixité sociale.
Par exemple, avant on parlait beaucoup de développement durable et maintenant je suis absolument critique. Mais quand même, ça a mis une graine dans mon cerveau. C’est surtout par l’éducation, mais aussi par l’expérimentation. Tu apprends par l’expérience et la mise en commun. »
Comment résumerais-tu les raisons de ton saut en politique municipale ?
« On a un manque d’intérêt pour la politique municipale, alors que ça joue tellement sur notre quotidien. Il y a moyen de mettre les résidents au coeur de nos politiques et de notre façon d’organiser nos espaces et notre économie pour quelle soit la plus locale. On peut avoir en tête la justice sociale et la transition écologique. J’ai envie d’entreprendre ce mouvement parce que je le fais de manière générale et ça me fait plaisir d’avoir le leadership et l’audace de dire que j’ai envie de représenter les gens qui veulent prendre cette direction. »
Pourquoi pas la politique provinciale ou même fédérale, où le pouvoir pour faire changer les choses d’un point de vue global est plus grand ?
« La phrase « Penser global, agir local », c’est quelque chose qui me drive et qui drive mon parti. Il y a plein de théories selon lesquelles la lutte aux changements climatiques va se faire au niveau régional, dans les municipalités.
Par exemple, à Québec, la moitié des GES sont produits par la mobilité, par les déplacements. En sachant ça, on ne peut pas avoir un troisième lien à Québec. Donc c’est juste de dire comment on peut à l’échelle locale faciliter cette transition, enlever notre dépendance à la voiture, revoir notre économie à petite échelle, etc. Il y a plein de places dans le monde où ça se met en application.
Par rapport au troisième lien, ce n’est juste pas la direction qu’on veut prendre, à cause de l’étalement urbain, de la dépendance à la culture automobile. On embarque pas dans ce discours là, car pour nous il n’est pas valide. Il faut avoir du courage. On a pas le choix de dire « Ça, c’est chez nous et on aimerait ça que les choses se passent autrement. ». Je veux être sûre que les personnes qui sont pour le troisième lien comprennent que ce n’est pas parce qu’on ne veut pas qu’elles se déplacent à Lévis. On veut changer les manières de s’y rendre. »
Les québécois sont toutefois loin d’être prêts à changer d’un jour à l’autre leur manière de se déplacer, pensons simplement à la réponse négative qui a suivi votre annonce sur les péages autoroutiers.
« On ne veut pas s’attaquer aux citoyens et citoyennes qui ont besoin de leur voiture pour se déplacer, mais à la dépendance à la voiture en général. Nous on écoute la science, on doit agir pour diminuer les GES. On veut densifier pour faire en sorte qu’il y ait des commerces de proximité, mais aussi offrir le transport en commun gratuit. Il faut se donner les moyens de changer nos habitudes.
C’est juste de dire : on doit prendre cette direction là, on doit le faire collectivement et on veut encourager les initiatives individuelles. Ce n’est donc pas dans une volonté d’écraser les idées de ceux qui aiment leur voiture. Il faut se donner le droit de rêver pour changer nos habitudes et nos comportements. »
Comment interprètes-tu les résultats du dernier sondage, situant Jackie Smith dernière dans la course avec 3% des intentions de vote ?
« Je dirais qu’on sait que notre présence est légitime et que nous sommes écoutés. On a pas une impression de 3% lorsqu’on fait du porte-à-porte. Somme toute, on est content du travail qu’on fait et de l’importance de notre présence pour que les autres partis n’aient pas le choix d’intégrer l’écologie dans leur discours. »
Comment vois-tu votre rôle, soit de présenter une voix qui s’annonce comme différente ?
« Je pense que c’est un rôle d’authenticité. On ne fait pas de la politique à partir de sondages, mais à partir de nos coeurs, de nos convictions et de la science. Quand je vois Jackie en débat, je tripe. Dans une optique de justice sociale et de justice écologique, on a pas le choix de revoir notre manière de faire et d’être. On veut faire de la politique différemment et les gens le remarquent. Si c’est ça qu’on retire le 7 novembre prochain, on va en sortir gagnants.
Tant mieux si on peut avoir plusieurs élus pour tirer le débat vers ces enjeux-là. Ça prend notre présence pour que la majorité des réalités soit entendue. »
Que réponds-tu à quelqu’un qui ne prendrait pas ton parti au sérieux ou qui refuserait de considérer vos propositions ?
« C’est l’espèce de facilité, de condescendance de la droite envers la gauche, de ne pas prendre en considération la véracité ou le fondement des mesures proposées. C’est aussi facile que de dire qu’on est des « pelleteurs de nuages ». Nous autres, ça ne change pas grand chose dans notre action.
L’autre jour, je me suis fait traiter de woke dans la rue. Sur le coup, ça m’a fâché parce que je savais qu’il le voyait comme une insulte, avec toute l’histoire entre Gabriel Nadeau-Dubois et François Legault. Après ça, il faut juste se réapproprier le terme. C’est très quatrième vague féministe de se réapproprier les insultes. Souvent, quand tu fais partie de la résistance et des mouvements sociaux on te pointe du doigt alors que ce qu’on veut c’est un monde meilleur pour tous. »
Je pense que ce qui dérange, c’est l’impression que les wokes détiennent la vérité, ou la posture du « nous autres, on a compris ».
« Ce n’est pas que les autres partis n’ont pas de propositions intéressantes. Je pense qu’il faut être convaincu de ce qu’on propose pour convaincre les autres. Et la science appartient à tout le monde.
Je pense que c’est une critique tout à fait valable la question que tu poses. Dans une optique d’éducation populaire, il faut s’assurer que les personnes sentent qu’ils ont la capacité et la possibilité de s’instruire et de débattre. On a cette intention de le faire en dialogue, de vouloir intégrer l’éducation dans notre démarche ou dans notre manière de parler des enjeux. C’est clair que ça ne va pas toucher tout le monde.
Notre but c’est vraiment la décentralisation, de penser la politique différemment. On veut avoir plus d’espaces pour faire en sorte que cette science qu’on défend tellement soit accessible à tout le monde et dans une logique d’émancipation de tous et toutes. »
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