Je sais, tout le monde fait ça.
En politique, on a l’habitude des phrases « punchées » qui permettent d’attaquer l’adversaire, de marquer des points ou de mettre en valeur (exagérément) ce que l’on promet de faire.
Le truc est vieux comme le monde. Trump, par exemple, avait pris le pouvoir en convainquant l’électorat que les États-Unis n’étaient plus « great ». Ça lui permettait de noircir le tableau de tous les autres et de confirmer les impressions abusives de son électorat. Son pays n’était pas moins « great », mais la formule permettait de soulager celles et ceux qui avaient envie d’imputer leurs malheurs aux autres. C’est commode et fréquemment employé en politique.
À Québec, Labeaume disait qu’avant lui, il y avait un climat de morosité, histoire d’exagérer sa contribution au changement de ton et au dynamisme qu’il y avait à Québec. L’Allier ne s’était pourtant pas tourné les pouces! En débat, j’avais répondu à Régis Labeaume qu’il avait raison, car avant lui il n’y avait ici « que des volcans et des dinosaures ». Je voulais, par la caricature, mettre en évidence sa propre caricature. Ça avait fait sourire, mais ça m’apparaissait juste. Faut pas pousser, les amis…
C’est comme lorsqu’un politicien dit qu’avant lui, la personne au pouvoir « n’avait rien fait » pour régler tel ou tel dossier. Rien fait? Vraiment? Pourtant, la personne, ministre, maire, conseiller, est pourtant entrée au boulot pendant des semaines, pendant des années. S’est-elle vraiment croisée les bras, tout ce temps?
Bien sûr que non. Les résultats peuvent décevoir, mais « rien fait »?
Bruno Marchand en fait un usage volontaire depuis plusieurs semaines. Je l’ai écrit : c’est une candidature fortement appuyée sur des lignes de com. Il en a toujours une de prête. Par exemple, il se promène ces jours-ci en disant qu’on « a une ville à bâtir ». Ça parait bien, ça fait ambitieux, ça laisse entendre qu’avant lui, tout était de la m…
Or, regardez dehors : la ville, elle est bâtie, déjà. Elle est là, partout, solide, forte, fière. Y’a de nombreux parcs, des rues, des arénas, des édifices municipaux, etc. En vérité, le boulot est déjà réalisé. C’est là qu’on voit la limite des lignes de com. Dire ça, « on a une ville à bâtir », c’est, au mieux, naïf.
La démocratie municipale? Ah oui, là, je vous suis! Elle est à rebâtir. Le terme est important ici, rebâtir, car elle a existé, fortement, pendant les années L’Allier. Le Rassemblement populaire en est un témoin éloquent.
Bref, ça finit par user un peu, ces enflures verbales. Y’a du boulot en masse pour vous, élus du conseil, sans que vous vous donniez pour mission de rebâtir Québec. En fait, ce changement de ton à l’hôtel de ville pourrait être l’occasion d’un dialogue franc et ouvert avec les citoyens. Ils sont capables d’en prendre, figurez-vous. Plus que certains élus et stratèges veulent bien l’admettre.
D’ailleurs, au lieu d’annoncer la construction d’une ville déjà debout, pourquoi ne pas commencer par arrêter de cacher ce que vous prévoyez faire aux gens? Par exemple, en disant pendant la campagne électorale que vous soutenez totalement le tramway, au point de déjà rêver d’une deuxième phase. Pourquoi ne pas dire pendant la campagne électorale ce que vous pensez du troisième lien? La démocratie, les électeurs méritent qu’on la traite avec respect.
Si vous faites ça, déjà, vous aurez rebâti les ponts entre la Ville et ses citoyens. Ce sera un énorme accomplissement qui méritera des félicitations. Enflures verbales en moins, évidemment…
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