Le premier ministre Legault ne recule visiblement devant rien lorsqu’il s’agit de nourrir sa popularité. Il se la joue très « people » et il adore ça, il veut avoir l’air du « gars ben ordinaire ». Vous pouvez cependant parier que tout cela ne vient pas de lui, mais de son équipe de communication qui fait tous les efforts nécessaires pour rendre cet homme, pourtant comptable à la voix sans magnétisme aucun, attachant, proche du « vrai monde ».
Alors, on publie pour lui des tweets où il exprime, dans un langage d’une grande simplicité, tout son soutien aux Canadiens de Montréal, où il témoigne de sa grande passion pour notre sport national. Alors, pour plaire à son public, Legault n’hésite pas à employer le langage du hockey ou à avancer des comparaisons boiteuses, pourvu qu’il se serve à tout prix de l’affection des gens pour ce sport. Par exemple, pour rendre hommage à Régis Labeaume qui annonçait son départ, il déclarait que le maire de Québec était « le Cole Caufield » de la politique, en référence (on présume) à sa petite taille…
Certes, cette comparaison faisait passer Legault pour le Réjean Houle de l’humour puisqu’on voit mal en quoi un politicien en fin de carrière peut ressembler à un jeune joueur talentueux qui en est à ses premières armes dans la LNH. Mais, ce n’est pas important. L’objectif de cette communication n’est pas de dire quelque chose d’intelligent ou de pertinent, mais plutôt d’avoir l’air cool en intégrant le sport chouchou des Québécois dans le langage politique du quotidien.
Et la stratégie marche très bien, les sondages prédisant qu’il se dirige vers un raz-de-marée épeurant, consacrant alors sa tendance à centraliser le pouvoir et le garder pour lui tout seul.
Alors, on pousse la stratégie jusqu’à l’absurde, la dernière en date étant de titiller les gens de Québec avec le retour des Nordiques. Les stratèges de Legault, voyant le troisième lien se transformer en boulet, ont cherché un sujet plus consensuel : bingo, les Nordiques!
Honnêtement, j’ai ri. Je n’ai rien contre leur retour. Plus jeune, mon rêve était d’être affecté à la couverture des Nordiques. J’aime le hockey, le sport, j’en mange, comme bien des gens.
Mais…
Comme plusieurs, j’ai suivi de près les tractations d’expansion de la LNH. On a compris que Québec n’était pas dans les plans. Labeaume a déjà joué avec nos sentiments, plusieurs fois, on connait la chanson. Rappelez-vous, en campagne en 2013, il annonçait la mise au jeu officielle pour le 2 septembre 2015.
J’attends encore…
Legault peut bien essayer de nous manipuler à son tour, mais il risque de trouver plus de sceptiques qu’autrefois. À force de crier au loup, le public ne remue plus. Ou moins.
Évidemment, si le privé ramène les Nordiques, à ses frais, qu’il empoche les profits ou assume les pertes, ça me va très bien. J’irai appuyer notre club avec passion. Cependant, il n’y a aucune raison que l’État mette le nez dans ce dossier. On fait valoir, tel un hochet pour enfant, des retombées économiques pour la région. Or, rien n’est moins sûr. On a déjà lu les propos de chercheurs comme Coates et Humphreys (Université du Maryland) qui ont recensé la littérature scientifique sur cette question. Conclusion? Les économistes n’ont trouvé aucune preuve de retombées économiques positives des équipes de sport professionnel et de leurs installations sur l’économie des villes. L’économiste américain Scott Niederjohn va dans le même sens : le revenu disponible ne change pas. Ce que les citoyens dépenseront pour un éventuel match de hockey, ils l’auraient dépensé en spectacle ou en cinéma. Ce ne sont pas de nouvelles retombées, ce n’est qu’un déplacement de dépenses.
Et puis… si c’est si bon pour nous, pourquoi le privé ne s’y lance pas, tête première?
Parce que c’est un pari risqué. Et le risque, c’est un principe capitaliste. En principe du moins. Sinon, on en revient à cette définition connue du capitalisme : socialiser les risques, privatiser les profits.
Alors, un retour des Nordiques? Oui, si le privé nous l’offre. Autrement, inutile de crier au loup ou de détourner l’attention du troisième lien. Le populisme manipulateur a des limites, même quand il s’agit de faire vibrer notre cœur de partisan.
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