Voici une lettre que j’ai écrite à Hollywood, que je te partage dans son intégralité, parce que je crois qu’elle est d’intérêt public (et par “intérêt public”, je veux dire “lis ça, ça te concerne”, et par “concerne”, je veux dire “Soit je te parles, soit je parles de toi, donc lis!”).
Par Jérôme Claveau
Ça va comme suit.
Cher Monsieur Hollywood.
Bonjour.
Je viens aujourd’hui t’écrire une lettre utilisant plusieurs lettres pour former des mots qui expliquent comment tu as ruiné ma vie.
Tout cela débute par le fait que je suis une personne qui n’aime pas le temps des fêtes.
Et à cause de toi, oui, toi, Monsieur Hollywood, épicentre de tout ce qui est bon dans notre univers artistique et culturel (dans la mesure où je n’ai jamais rien vu d’autres que des films hollywoodiens), à chaque fois que je parle de mon désamour du temps des fêtes, instantanément, et sans attendre, on me traite de “Grincheux”. Comme ça. Sans aucune forme de procès où j’aurais le bonheur de hurler “OBJECTION!”.
Et les gens qui me collent cette épithète, de bonnes personnes sans aucun doute, remplies de bonne volonté et de délicieux sucre à la crème, se sentent immédiatement investis de la mission divine de me faire aimer le temps des fêtes comme si c’était mon propre enfant (ce à quoi je répondrai “Mais je ne veux même pas avoir d’enfants!”, ce à quoi les gens répondrons “Scandale!”. Ce sera pour une prochaine lettre).
Tu l’auras deviné, tout cela est causé par ton film, le “Grincheux”, dont tu as eu l’indécence de faire plusieurs versions qui racontent toutes la même histoire. Depuis quand est-ce que tu fais ça, Monsieur Hollywood, han? Toujours raconter la même histoire d’un film à l’autre!? Ça ne te ressemble pas.
Peu importe.
Je te résume l’histoire du Grincheux, des fois que tu l’aurais oubliée et que tu avais en tête d’en refaire une nouvelle mouture identique.
C’est l’histoire du Grincheux, un bonhomme vert et poilu qui vit dans un monde où la vie de tout le monde tourne autours de Noël. Et quand il était jeune, tout le monde se moquait de lui et le ridiculisait parce qu’il était différent. Et là, on lui reproche de ne pas aimer les gens et d’essayer de ruiner leur temps des fêtes comme ils ont ruiné son enfance.
Et à la fin, on découvre que pendant tout ce temps, dans le secret de son coeur rabougri, le Grincheux voulait aimer Noël comme tout le monde, parce qu’apparemment, dans la vie, il n’y a que cela qui compte, le temps des fêtes.
Vois-tu le problème que tu as causé, Monsieur Hollywood. Le vois-tu?
Déjà, je trouve que la comparaison avec le Grincheux est insultante. Je ne suis ni vert, ni poilu… bon, okay, je suis poilu. Mais pas vert.
Ensuite, ton Grincheux propage l’idée que c’est anormal de ne pas aimer le temps des fêtes. C’est une aberration. Une monstruosité sans nom. Comme si Voldemort et Sauron avaient eu un enfant et l’avaient appelé “Quasimodo”.
Ensuite ensuite, ton Grincheux propage l’idée que les gens qui n’aiment pas le temps des fêtes aiment ça secrètement, sauf qu’ils sont trop gênés pour demander, ou je sais pas quoi, et qu’il est donc de la responsabilité des bon petits citoyens d’endosser son auréole de Mère Thérésa pour sauver leurs âmes.
Je suis désolé de te l’apprendre, Monsieur Hollywood, mais pour la première fois de ta vie, ton film n’est pas réaliste.
Il y a plein de raisons naturelles de na pas aimer le temps des fêtes. C’est un temps où on célèbre en famille, et plusieurs personnes n’ont pas de bonnes relations avec leur famille. Aimerais-tu ça qu’on te force à faire la fête avec du monde que t’haïs, et que ce monde-là que t’haïs passe la soirée à te passer plein de commentaires sur le fait que tu ne démontres pas suffisamment de plaisir à festoyer avec des gens que t’haïs?
C’est aussi le temps des cadeaux. Sauf que je peux donner des cadeaux quand je veux. Je n’ai pas besoin d’attendre la sanction capitaliste pour dire à quelqu’un “Voilà, j’ai pensé à toi!”.
Et puis, il y a les chansons de Noël, qui donnent envie de remonter dans le temps et d’assassiner la personne qui a inventé la musique.
Et surtout, SURTOUT, je n’ai pas besoin d’être “sauvé”. Je suis bien à l’aise de passer mon temps des fêtes chez moi, tranquille, seul et en pantoufles.
Mais à cause de ton Grincheux, Monsieur Hollywood, les gens ne sont pas capables d’accepter ça.
Je t’implore donc de refaire le Grincheux, mais cette fois-ci, tout le monde laisse le Grincheux en paix, le Grincheux laisse le monde fêter Noël, et au final, tout le monde est heureux de laisser les autres vivre leurs vies en paix.
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