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Ensemble pour des états généraux sur la forêt urbaine

Agrile du frêneDes arbres marqués pour abattage le long de la Saint-Charles, en novembre 2021 (Jean Cazes/Monquartier.quebec).

Une récente étude de la Fondation Suzuki révèle que les citoyens sont prêts à payer plus pour le maintien de la forêt urbaine. La science est sans ambigüité sur les bienfaits associés aux arbres urbains. Pourtant, plusieurs grands mythes « justifient » encore l’abattage de nos arbres. Alors que la canopée est en recul et que des milliers d’arbres sont menacés par le projet du tramway, nous réclamons la tenue d’états généraux sur la forêt urbaine dans notre capitale nationale, afin de réfléchir ensemble aux meilleures pratiques à adopter pour mieux la protéger.

Mythe #1. La forêt urbaine se porte bien, les citoyens peuvent avoir confiance

Faux. Le couvert forestier recule. Malgré un agrandissement du périmètre d’urbanisation, qui a pour effet d’offrir plus d’arbres à abattre tout en noyant la perte de canopée dans un territoire plus vaste, le recul est d’au moins 1 % depuis 2015. Le dernier bilan de la Vision de l’arbre atteste que la canopée a reculé dans le tiers des quartiers, de 4 % en moyenne. Et dans 23 des 35 quartiers, la cible pour 2025 s’avère hors d’atteinte. Le recul s’explique en partie par les ravages causés par l’agrile du frêne, mais surtout par le consentement à abattre qui n’implique aucune justification publique. Alors que plusieurs citoyens et organismes ont demandé à être informés des coupes affectant leur quartier, on leur a répondu qu’ « Il n’est pas dans les intentions de la Ville de consulter les citoyens lors de la coupe d’arbres, que ce soient des arbres publics (pour lesquels la Ville a des experts consultés) ou des arbres privés. »

Mythe #2. Il faudra toujours couper des arbres.

Faux. C’est une mauvaise planification et gestion du territoire, voire l’autorisation de projets discutables, qui conduisent à abattre les arbres sous prétexte qu’il s’agit d’obstacles. Prétendre que la coupe d’arbres est inéluctable, c’est en fait admettre notre faible volonté à considérer les arbres et à les intégrer dans l’élaboration d’un projet. Alléguer, par la réglementation, qu’ils représentent des obstacles, c’est ignorer que les arbres sont des infrastructures naturelles qui offrent des services collectifs au même titre que nos infrastructures municipales. Car dans les faits, la réduction de notre patrimoine arboricole ampute notre résilience collective et engendre des pertes économiques importantes.

Mythe #3. On peut compenser les coupes massives par des plantations.

Faux. Si l’on peut planter quelques jeunes arbres après avoir déminéralisé une surface asphaltée en milieu urbain, c’est positif, mais la plantation de petits arbres d’alignement ne peut aucunement compenser la perte des massifs forestiers ou des arbres matures. Contre ce préjugé tenace, il suffit de reconnaître la faible espérance de vie des arbres de rue, et que la compensation nécessaire au maintien de services écologiques équivalents est d’au moins 20 petits arbres pour chaque arbre mature. Or comme nous n’avons pas l’espace pour une telle compensation, il faut renoncer à l’abattage d’arbres en milieu urbain et conserver tous nos boisés.

Mythe #4. L’arbre appartient à un propriétaire qui n’est pas redevable à l’égard de la communauté.

Faux. En considérant les services écologiques fondamentaux que les arbres rendent à la collectivité, on ne peut plus affirmer sérieusement que les arbres appartiennent exclusivement au propriétaire d’un terrain. Les arbres sont un patrimoine naturel commun que nous nous devons de conserver pour les générations futures. Nous savons bien que certains promoteurs ont acquis des terrains dans l’espoir que la Ville les dézonerait bientôt pour du développement sans contraintes. Mais cette époque est révolue : les milieux naturels d’intérêt, les milieux humides et les boisés doivent être protégés par la collectivité pour la collectivité, et ce indépendamment des intérêts privés. Aussi, tout abattage doit faire l’objet d’une autorisation rendant public son motif. Il est inadmissible que les citoyens soient systématiquement mis devant les faits accomplis.

Mythe #5. On peut abattre les arbres au nom du développement durable.

Faux. Affirmer que l’abattage en milieu urbain est compatible avec des politiques « vertes » ou des projets « écologiques » relève de l’écoblanchiment. Le cas du tramway ne fait pas exception. En contexte de crise climatique, tous les arbres font partie de la solution. Si les boisés et les grands arbres ne sont pas déplaçables, nos infrastructures urbaines, elles, le sont. Le véritable développement durable exige d’adapter coûte que coûte nos projets de développement aux arbres et boisés urbains existants, et en aucun cas l’inverse. Par exemple, si les contraintes anthropiques ne permettent pas au tramway de traverser le campus de l’Université Laval sans détruire irrémédiablement son patrimoine naturel, il faut y renoncer et concevoir des solutions alternatives.

En résumé, il faut reconnaître que nous coupons trop d’arbres, sans acceptabilité sociale, ce qui porte atteinte à notre patrimoine naturel commun. Si la nouvelle équipe à la tête de la Ville de Québec souhaite réellement améliorer la situation, il faut qu’elle déconstruise ces mythes en se donnant de nouvelles orientations dans le cadre d’un véritable dialogue sur la question. C’est pourquoi, nous soussignés, appelons à la mise sur pied d’états généraux sur la forêt urbaine, dans l’optique d’une concertation non-partisane qui réunirait les scientifiques, les services municipaux, les organismes en environnement et les groupes déjà engagés sur le terrain. Ce serait une manière d’investir pour protéger mieux et durablement notre forêt urbaine.

Daniel Desroches et Denise Leahy, Les Amis du Boisé Neilson

Martin Fournier et Marie-Hélène Felt, Vigilance Arbres Sainte-Foy

Angela Marsh et Elsa Moreau, Mères au front

Thierry Lefèvre, Des Universitaires

Florian Burkhard, Collectif La ville que nous voulons

Nicolas Lescarbeau, Les Ami.es des Jardins du Corps-de-Garde

Jean-Paul Galbrand, Forêt Charlesbourg

Gaétan Paquet, Ingénieur forestier retraité 

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