Cher journal.
Ça va peut-être te surprendre, mais cette semaine, c’était la Saint-Valentin.
Et étant donné que tu me connais, en ce moment, tu te prépares déjà à ce que je t’embarques dans une interminable montée de lait aux proportions du Burj Khalifa dont j’ai le secret.
Un secret aussi bien gardé que celui de la Caramilk.
La même Caramilk cheap que t’as achetée dimanche à ta douce moitié, dans une tentative désespérée de lui prouver que votre amour vaut quelque chose.
Mais bon, suprise, je chiâlerai pas contre la St-Valentin.
Quoique…
Le chocolat, une preuve d’amour? Pour vrai!? “Regarde mon amour, pour te démontrer à quel point notre amour est unique et précieux pour moi, je t’ai acheté ce que n’importe quel idiot peut acheter au dépanneur à longueur d’année. Regarde, y’était en spécial à 2 pour une piasse!”
En passant, juste pour l’anecdote, à une certaine époque, dans certaines civilisations, le cacao était utilisé pour faire du chocolat chaud ET comme monnaie d’échange. Donc quand tu buvais un chocolat chaud, tu buvais littéralement ton argent.
Bon, j’arrête. Je me suis promis de ne pas chiâler contre la St-Valentin et la mercantilisation de l’amour.
Je ne vais pas non plus chiâler sur le Super Bowl, et le fait que le football est un sport qui a été inventé expressément pour la télévision. Juste pour pouvoir vendre des spots publicitaires.
En fait, je vais juste ne pas chiâler tout court. Point.
Parce que mardi, j’écoutais des gens complètement saoûls dans un salon à un heure du matin qui chiâlaient sur la société et tout le reste, et c’est là que j’ai compris qu’avoir des opinions, c’est aussi pertinent qu’avoir une collection d’ouvre-boîtes défectueux.
Ça ne sert à rien.
Parce qu’il n’y a que deux catégories de personnes à qui je peux partager mon opinion.
D’un côté, il y a les gens qui sont d’accord avec moi. Mais il est où, le paisir, là-dedans?
Tout ce qu’on fait, c’est se gratter le dos dans le sens du poil de la bête avec le truc de petites tiges en métal que tu te glisse sur la tête pis ça te fais des frissons. Des frissons de satisfaction de se dire “On détient la vérité. Mon doux qu’on est intelligents.”
Mais ça, c’est tristement platte et inutile, parce que le but d’avoir des opinions, c’est de les partager aux gens qui ne pensent pas comme moi, pour leur prouver que j’ai raison et qu’ils sont cons.
Sauf que le monde qui pensent pas comme moi, quand je leur partage poliment mon opinion, fondée dans la pure vérité objective, en leur gueulant “MAIS KESSÉ TU COMPRENDS PAS, MAUDIT ABRUTI!?”, ils ne m’écoutent pas.
Parce qu’ils sont persuadés qu’ils ont raison et que j’ai tort.
Alors que tout le monde sait très bien que c’est mon opinion qui est la bonne! Je suis une personne intelligente et informée, qui forge sa propre opinion à partir de faits véridiques et vérifiables. Je sais de quoi je parle.
Mais vu qu’ils ne m’écoutent pas, ils ne peuvent pas comprendre les vérités simples que j’essaie de leur inculquer. Des vérités aussi évidentes qu’un yéti dans ta boîte à lunch.
Et au final, leur opinion reste la même! Ce qui veut dire que dans les deux cas, exprimer mon opinion n’a servi strictement à rien.
Et vu qu’exprimer son opinion est la seule raison pour laquelle on a une opinion, j’en conclus donc que ça ne donne rien, avoir des opinions.
Et je comprends maintenant le philosophe Schopenhaeur, quand il a dit “la vérité est un puit sans fond où les gens se noient sous le poids de leurs opinions”.
Mais ça, c’est juste mon opinion.
Jayman
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