Le programme Première Ovation s’est trouvé au cœur d’un litige au conseil de ville cette semaine, en raison du refus du comité exécutif de donner son aval à un avis de proposition déposé par l’opposition officielle.
Par Gabriel Côté
Pourtant, Québec Forte et Fière et Québec d’abord sont en accord sur le fond des choses. L’avis de proposition en question proposait de modifier le critère d’âge par un critère de début de carrière, pour donner accès au programme Première Ovation, dont la mission est d’aider financièrement et professionnellement les artistes émergents. En campagne électorale, le parti de Bruno Marchand avait d’ailleurs fait de cette proposition l’un de ses chevaux de bataille en matière de culture.
Du côté de l’exécutif, on maintient qu’on est toujours en faveur de la modification de ce critère, mais qu’on a besoin de temps pour « travailler le dossier ». Quant à l’opposition officielle, elle dit qu’elle commence à connaître ce refrain.
« ‘’Réaliser une analyse’’ est certainement un pas dans la bonne direction même si nous jugeons que l’administration Marchand a eu suffisamment de temps pour faire cette étude », a fait savoir Québec d’abord dans un communiqué de presse émis lundi soir dernier.
Selon la conseillère de Vanier-Duberger, Alicia Despins, la manière de procéder qu’emploie l’administration Marchand équivaut à mettre la charrue devant les bœufs.
« Nous, ce qu’on dit, c’est simplement : entendons-nous sur le principe, on discutera de son application ensuite ».
Courriel
Québec d’abord déplore aussi le refus de la part de la Ville d’une demande allant en ce sens en décembre dernier.
« Malgré la cohérence de cette demande avec l’esprit des engagements électoraux culturels de Québec Forte et Fière, rappelons que, le 18 décembre dernier, l’initiative des artistes de la relève en arts visuels a essuyé un refus. La Ville de Québec doit se joindre au mouvement et imiter tous les autres grands organismes publics, comme le CALQ et la SODEC, ayant éliminé le critère de l’âge au profit d’un critère de début de carrière. C’est une question d’équité », pouvait-on lire dans le même communiqué.
La demande en question provenait de deux étudiants, qui dans le cadre d’un séminaire thématique à la maîtrise en arts visuels de l’Université Laval, ont réalisé un projet qui « cartographiait » la disparité homme-femme dans deux publications couvrant l’histoire des artistes importants de la préhistoire à aujourd’hui. En faisant cette recherche, ces étudiantes ont constaté que près de 50% des étudiants de première année à la maîtrise étaient âgés de plus de 35 ans.
C’est dans ce contexte qu’elles ont envoyé un document intitulé « Une relève : pour une révision des critères d’adminisssibilité au sein des organismes de subvention à la culture à la Ville de Québec », par courriel, à l’administration municipale.
Le 18 décembre, la Ville a répondu défavorablement à cette demande, dans un courriel obtenu par Le Carrefour.
« Bien que cette demande nous a déjà été acheminée à quelques reprises au cours des dernières années, la Ville de Québec et le ministère de la Culture et des Communications ont fait le choix de conserver les fondements de ce programme (…), peut-on lire dans ce courriel. Aussi, pour votre information, on compte en moyenne 60% de femmes qui a bénéficié de Première Ovation en 2020. Les disciplines comme le design rejoignent 50% de femmes ou encore la danse avec 90%. Seule la musique a une participation féminine minoritaire avec 23%. »
Il n’est pas clair si les élus de l’administration ont ou non vu passer la demande avant que le Service de la culture transmette cette réponse. Selon le fonctionnement habituel des choses dans l’appareil municipal, il serait naturel que les élus aient été consulté, mais le contraire n’est pas impossible.
Rappelons que le samedi 18 décembre était le lendemain du vote du budget 2022, dans lequel rien n’a été prévu à cet effet, de même d’ailleurs que dans l’entente de développement culturel 2021-2024. Selon nos informations, le Service de la culture travaillerait pour revoir le programme en vue de 2023 ou 2024, conformément à l’engagement électoral de Québec Forte et Fière.
Et Première Ovation ?
Le Carrefour a contacté Première Ovation pour savoir si cette modification du critère d’âge par un critère de début de carrière était vraiment un besoin urgent. Le conseiller en communication pour la mesure Première Ovation, Vincent Leboeuf Gadreau, fait valoir qu’il est important d’être patient avant de prendre position pour ce genre de modification.
« Avant de se positionner sur un tel changement, il est important d’analyser l’impact de cette proposition de modification de la mesure Première Ovation qui compte 13 disciplines. L’étude présentée provient des étudiants en art visuel de l’Université Laval. Il est donc requis de prendre le temps de rencontrer le partenaire financier (Ministère de la Culture et des Communications) ainsi que les 9 organismes gestionnaires de la mesure Première Ovation. Le tout dans le but d’avoir un portrait juste et équitable de la situation », explique-t-il par courriel.
Toujours selon M. Leboeuf-Gadreau, des validations doivent se faire avec le partenaire financier, les organismes gestionnaires de la mesure et même le milieu culturel. « Les premiers échos que le Service de la culture, du patrimoine et des relations internationales (SCPRI) reçoit sont très partagés », note-t-il.
Avant donc de prendre position, le Service de la culture compte rencontrer les intervenants concernés, et produire des recommandations aux autorités municipales. Ce n’est qu’ensuite qu’il sera possible de mettre en place des recommandations allant en ce sens.
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