Cher journal,
Aimes-tu ça, toi, les potins?
Ah, c’est certain que t’aimes ça!
Tout le monde aime ça!
Hey, en passant, sais-tu ce que Mathias a fait hier?
Tu vois? Tu ne sais pas qui est Mathias, et tu veux savoir ce qu’il a fait. Tu te demandes “Est-ce qu’il a fait une connerie? C’est sûrement une connerie. On n’en parlerait pas si c’était pas une connerie! Quelle connerie il a faite?”.
Et ça, tu vois, pour moi, c’est la preuve que les potins, ça fait partie intégrante de la nature humaine. Une vie sans potins, c’est une bière sans alcool. Oui, dans le meilleur des cas, ça l’as l’air d’une bière, mais il te manque un petit quelque chose pour que ton expérience soit agréable.
Moi, j’aime ça, les potins. J’adore ça. En faits, ce n’est même plus de l’amour, c’est de la dépendance. Je suis rendu junkie des potins. Je m’injecte des potins directement dans le tympan.
C’est plus fort que moi, dès qu’on se met à parler de quelqu’un d’autre, j’arrête tout ce que je suis en train de faire pour écouter. Je pourrais être en train de mourir, j’arrêterais pour écouter. J’ai besoin de savoir.
Ce qui est fantastique, c’est que depuis que j’ai accepté mon amour inconditionnel pour les potins, je n’ai plus besoin de Netflix. La vie en société est devenue LE roman savon en réalité virtuelle augmentée ultra réaliste (qu’on appelle aussi “la réalité”!).
Comme ce qui se passe avec Mathias. Ah, ça là, c’est le genre d’affaire qui ne s’invente pas. Et c’est ce qui rend ça encore plus fascinant que Netflix. Parce que les gens qui inventent des histoires, ils ont beaucoup moins d’imagination que Mathias pour créer du drame!
Bon, soyons honnête, pendant longtemps, je n’aimais pas les potins. Ou plutôt, j’aimais ça, mais je me sentais coupable. Parce que, dire des affaires méchantes dans le dos des gens, c’est méchant, non?
En même temps, je me verrais mal dire en pleine face de Mathias “Hey, as-tu vu à quel point c’est cave, ce que t’as fait?”, parce que là, il va apprendre de ses erreurs, arrêter de faire des affaires caves, et cesser d’être une source intarissable de potins plus extraordinaires les uns que les autres.
Sauf que j’ai réalisé qu’il y a plein de positif dans le fait de potiner. Pour moi. C’est strictement pour mon propre plaisir. Ça n’aide en rien la société. Ça peut même détruire des vies. Mais moi, ça ne fait qu’enrichir la mienne.
Déjà, quand les gens me partagent le “croustillant”, ça veut dire que je fais partie de la gang. Penses-y, on ne se promène pas en racontant des ragots à des inconnus dans la rue!
En plus, quand c’est moi qui arrive avec un nouveau potin tout frais que personne a encore entendu, ça me donne de la valeur. Je deviens la star du groupe. Et ça me permet de faire la conversation avec mes amis en n’ayant absolument rien de constructif à dire!
Et des fois, je l’avoue, ça me fait me sentir un peu mieux, de potiner. Quand j’ai le moral passé au fer plat, ça me fait une petite chaleur, ici, dans mon coeur, de savoir qu’il y en a qui sont pires que moi. On peut donc dire que les potins que j’ai amassés sur les gens sont des espèces d’antidépresseurs que je transporte en permanence en moi.
Tout ça pour dire que tu devrais cesser d’avoir honte de potiner. Il faut juste le faire de manière responsable. Et concernant Mathias, malheureusement, je ne peux pas te dire ce qu’il a fait. Ce n’est pas de ta faute, tu ne fais juste pas partie de la gang! Bye!
Jayman
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