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Tramway : Marchand dénonce une attaque directe de la CAQ contre la ville de Québec

Le maire de Québec, Bruno Marchand, en point de presse le 23 mars.Le maire de Québec, Bruno Marchand, en point de presse le 23 mars. Photo : Gabriel Côté

Le maire de Québec ne flanchera pas. Malgré les conditions du gouvernement de la CAQ, la Ville n’abandonnera pas le scénario d’une rue partagée sur René-Lévesque.

Par Gabriel Côté

Suivi par les membres du comité exécutif, Bruno Marchand a fait son entrée dans la salle de réception de l’Hôtel de Ville en marchant d’un pas presque militaire. Une fois derrière le lutrin, il s’est exprimé avec la conviction de l’homme en colère.

« C’est une mauvaise journée pour Québec », a-t-il lancé d’entrée de jeu. « Il s’agit d’une attaque directe et en règle contre la ville de Québec », a-t-il ajouté, en référence à la sortie d’Éric Caire et de François Bonnardel plus tôt dans la journée.

Le gouvernement provincial ne se mêle pas de ses affaires, croit le maire, qui déplore une ingérence de la part de la CAQ dans un dossier de compétence municipale. Il voit d’ailleurs une contradiction dans l’attitude du gouvernement. « Mme Lebel disait que le gouvernement du Québec n’acceptera pas d’ingérence fédérale dans les compétences provinciales. Pourtant, hier, le gouvernement a décidé unilatéralement qu’une des conditions pour l’émission du décret est le retrait de la rue partagée. »

Pour le maire de Québec, pas question de renoncer au scénario d’une rue partagée, quoi qu’en pense le gouvernement. Selon une étude en ligne qui est toujours en cours, 56% des 1105 répondants seraient en faveur de ce scénario, alors que seulement 42% s’y opposeraient, ce qui fait croire à M. Marchand que loin de nuire à l’acceptabilité sociale du projet, l’option de la rue partagée y contribue. « Les gens qui habitent le secteur, c’est ça qu’ils veulent », a-t-il tranché.

Et alors que le gouvernement Legault lui reproche précisément de ne pas adhérer suffisamment à l’approche du « développement régional », le maire reste ferme dans sa volonté de travailler pour les gens de Québec d’abord, en notant que cela n’exclut pas de travailler en concertation avec les municipalités avoisinantes. « Les gens qui sont ici ont été élus par les citoyens de Québec (…). On est tous d’accord qu’on ne peut pas travailler en vase clos / mais on ne bâtira pas un tramway pour les gens de st-apollinaire », a-t-il déclaré, avant d’ajouter que le tramway « ne fait pas partie de leurs débats, leurs soirs de conseil. »

Au yeux du maire, la rhétorique du développement régional et la critique de ses récentes déclarations selon lesquelles « on ne construit pas un tramway pour les gens de Portneuf (…), de Château-Richer (ou de) Saint-Apollinaire » n’est rien d’autre qu’un prétexte de la part du gouvernement pour encore une fois retarder la réalisation du projet. « Si ça n’avait pas été cette déclaration, ça aurait été autre chose », a-t-il glissé sur un ton de découragement.

En conséquence, le gouvernement Legault devrait faire preuve de plus de vision, pense Bruno Marchand, qui déplore l’électoralisme apparent de la position prise par la CAQ. « On n’est pas là pour une élection, pour gagner un comté parce qu’on a peur de x,y,z », a-t-il lancé. « La CAQ fait le bon vieux calcul : nos circonscriptions sont pro-autos. C’est de la politique à courte vue. Il faut voir plus loin que ça. »

Les problèmes avec cette vision à court terme sont nombreux, croit le maire. Dans le grand ordre des choses, elle retarde le développement de la ville, l’amélioration de la mobilité dans un contexte de saturation du réseau routier et les actions concrètes contre les changements climatiques. Et sur le plancher des vaches, cette façon de faire de la politique entraine de nouveaux délais et des coûts supplémentaires pour le projet de tramway, en plus de susciter de l’inquiétude chez les partenaires issus du monde de l’industrie.

« Mettez-vous dans la peau d’un consortium. Les consortiums ont le goût de travailler avec quelque chose de prévisible (…). Le gouvernement qui est un gouvernement économique devrait comprendre ça aussi », a dit M. Marchand.

Il n’est pas simple de faire des changements, en respectant les délais et sans entrainer d’augmentation des coûts, a fait valoir le maire, en frappant à l’occasion sur son lutrin. « Il ne s’agit pas de changer les pages d’un powerpoint. Ce sont des milliers de pages de travail qui sont envoyées aux consortiums (…). C’est un travail colossal qui représente des coûts et des délais supplémentaires. »

Que fera le gouvernement, maintenant que la mairie de Québec a refusé certaines des conditions qu’elle vient de lui imposer ? Et que fera la Ville dans l’éventualité où le gouvernement ne lui octroie pas le décret dont elle a besoin, le 6 avril prochain ?

C’est une partie de bras de fer qui dure depuis plusieurs années déjà et qui risque de se poursuivre encore plusieurs mois, partie dont il n’y aura vraisemblablement aucun gagnant.  

Réactions

« Ce qui est important aujourd’hui c’est de s’élever au-dessus de la partisanerie et de considérations électorales, et de penser à l’intérêt des citoyens de Québec (…). Si le gouvernement veut le succès de ce projet-là, qu’il soit conséquent », a déclaré Claude Villeneuve, chef de l’opposition officielle à la Ville de Québec.

« Je suis plus que satisfaite du ton que le maire a utilisé aujourd’hui, il faut absolument tenir notre bout pour la rue partagée sur René-Lévesque. Ce n’est pas vrai que le tramway va congestionner le centre-ville, au contraire de nombreux déplacements pourront se faire en transport en commun. La rue partagée, c’est le choix de la mobilité durable et de la préservation des arbres, c’est que la population souhaite », a déclaré Jackie Smith, chef de Transition Québec.  

« La sortie intempestive du maire n’est pas propice à augmenter l’adhésion à l’égard du projet. À l’exception de vouloir faire un coup d’éclat de communication, il n’y avait aucune utilité à s’engager dans une joute verbale contre le gouvernement, qui est le plus grand bailleur de fonds du projet », a déclaré Éric Ralph Mercier, chef de Québec 21.

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