Souvent, j’utilise des images fortes pour exprimer non pas ma frustration, mais ma déception. Par exemple, en lisant ce qui ressort de « l’étude » d’impact économique brandie fièrement par le maire de Lévis, je me suis dit : tiens, il enfile à nouveau ses pantalons de fortrel à carreaux, ses favoris et sa moustache, pour prendre place dans sa Lincoln Continental 1970 pour venir nous « vendre » le troisième lien. « Ils l’ont-tu l’affaire, les Lévisiens! », dirait Gratton.
Par David Lemelin
L’humour, de tout temps, a servi à évacuer la pression, en riant plutôt qu’en pleurant. Chez moi, souvent, c’est un réflexe : des images colorées me viennent à l’esprit. Ça m’évite de déprimer.
En réalité, je ne sais plus si je trouve cela triste ou révoltant. C’est le même sentiment qui m’habite lorsque quelqu’un s’obstine à nier le réchauffement climatique. Un moment donné, on ne sait plus quoi dire. Dans le cas d’un élu, par contre, il y a quelque chose de plus malsain. Nier l’impact négatif du troisième lien en commandant des études complaisantes, ça a quelque chose d’inquiétant et de déroutant. Or, un décideur politique qui dispose d’un pouvoir devrait considérer encore plus sérieusement que les autres ce genre de question. Dès lors, en entendant Gilles Lehouillier saisir la poignée qu’il a commandée pour vanter les mérites du troisième lien, on se demande ce que les Lévisiens ont bien pu faire de mal pour se retrouver devant quelqu’un qui se permet de déformer la réalité afin qu’elle se conforme à un fantasme collectif. Bref, il s’agit de duper les gens à tout prix.
C’est terrible.
Pourtant, quand on lit la réplique de Jean-Philippe Meloche, de l’Université de Montréal, la conclusion est limpide : « faible crédibilité », « pas pertinent », « lecture biaisée », étude appuyée sur une « erreur méthodologique ». Le professeur rappelle que si on injecte 6,5 milliards $ n’importe où à Lévis, il est évident que ça va générer de l’activité économique. Le problème, c’est qu’on ne fait pas d’étude comparative. On fait exprès de ne pas vérifier si c’est le bon projet pour les bonnes raisons. On ne veut pas le savoir, on veut juste trouver des « arguments » en faveur du projet. Alors, on s’accroche au PIB, avançant même que le troisième lien réduirait les déplacements et, donc, les impacts négatifs sur l’environnement. Vous les voyez maintenant, les pantalons en fortrel?
Pire encore : la somme des « avantages économiques », qui est de 550 000 $ par année, n’approche même pas les 25,6 millions $ annuels nécessaires à l’entretien du troisième lien. Ainsi, même dans les arguments économiques « positifs », ça ne tient pas la route!
En somme, l’étude économique de Lehouillier sur le troisième lien ne vaut pas un clou. C’est un bidon d’essence pour la propagande, certes, mais pas une étude capable de justifier l’injustifiable. On peut deviner que ça n’arrêtera pas le maire de Lévis. Faut se rappeler que le ridicule ne tue pas. Car, s’il tuait, vous imaginez l’hécatombe au sein des élus?
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