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Campagne électorale : Le (dernier) petit bilan hebdomadaire

L’heure est déjà (ou enfin) au bilan final : qu’avons-nous vécu durant les dernières semaines ou plutôt, avons-nous vécu quelque chose ?

Ce que nous avons certainement vécu, c’est un déferlement d’informations, d’analyses, de débats, de bilans et de sondages.

Bref, la campagne a rendu sensible et évidente la place centrale des médias dans notre vie politique collective. L’organe médiatique, avec ses habitudes, sa méthode et ses objectifs, donne l’impulsion au mouvement des choses. C’est un constat qui est loin d’être nouveau, évidemment.

La nouveauté est que cet univers qui tourne sur lui-même est décomplexé : il semble normal que les médias déterminent les conditions de possibilité du jeu politique pour pouvoir ensuite le regarder et le commenter.

Le seul qui a critiqué le travail des journalistes ouvertement est Duhaime qui les accusait de « fouiller dans les poubelles ». Or, il faut s’imaginer que ceux qui sont mandatés de faire ce travail de recherche le font avec un esprit de sérieux.

C’est que nous assistons à une inversion assumée du paradigme : ce qui est politique est devenu presque frivole (on passe rapidement en revue les engagements politiques). La vie personnelle ou l’individu qui se cache derrière le politicien est ce qu’il faut sérieusement dévoilé aux électeurs.

C’est pourquoi la question de l’immigration est autant médiatisée. Les déclarations controversées de François Legault ou du ministre Jean Boulet semblent donner accès à ce que les caquistes pensent vraiment, authentiquement, au sujet des immigrants ; ce qui est devenu plus sérieux que d’avoir un réel débat sur l’enjeu de l’immigration.

Une campagne du spectacle

C’est d’ailleurs les gaffes de François Legault, surtout en immigration et à propos du 3e lien, qui ont fait couler le plus d’encre. Sinon, ce sont les taxes impayées de Duhaime qui arrivent probablement au deuxième rang et les « taxes oranges » de Québec solidaire au troisième.

Surtout, on a pu savoir presque en simultané ce que tous les chefs pensaient des dernières révélations ou maladresses. Les points de presse des partis politiques, qui devaient servir à présenter les engagements de leur plateforme, étaient un prétexte pour recueillir leur indignation et espérer qu’ils se « lâchent » et en donnent aux électeurs pour leur argent.

À partir d’une première bévue, on peut faire vivre la campagne médiatique en entier. La couverture médiatique couvre les nouvelles réactions à l’ancienne couverture. Le média se prend lui-même pour objet et nous lecteurs, en sommes les dupes témoins.

On pourrait répondre que les médias couvrent ce qu’il y a à couvrir. Autrement dit, ce sont peut-être les politiciens qui s’entre-attaquent, se fourvoient et commandent ainsi une couverture conforme à leurs imperfections.

La poule ou l’oeuf ? La question se pose, mais néanmoins, les politiciens savent que s’ils veulent avoir un espace médiatique, ils doivent offrir des clips ; des phrases chocs.

Cela ne veut pas dire que la couverture du spectacle n’est jamais pertinente. Il est bon de voir comment nos futurs dirigeants pourraient se comporter sous la pression ou dans des situations difficiles, pour séparer le bon grain de l’ivraie. Une réponse à une attaque en dit long et permet peut-être de mieux connaître nos politiciens et leur caractère.

D’ailleurs, c’est peut-être ce qui expliquerait que Paul St-Pierre Plamondon ait gagné en popularité durant la campagne. C’est lui qui aurait le mieux passer ce test de personnalité.

La sacrée sainte statistique

D’entrée de jeu, la campagne se devait d’avoir quelque chose d’absurde, puisque tous étaient au courant de la foudroyante popularité de la CAQ.

Évidemment, les Québécois pouvaient et peuvent encore changer d’idée, l’espace pour la liberté étant inévitable en démocratie. Mais il semble qu’au Québec, ce soit davantage un genre de parti pris pour le « fatalisme » qui domine les consciences.

C’est là-dessus que tente de jouer les politiciens lorsqu’ils déplorent le « manque de vision » de leurs adversaires. Ils essaient de dire qu’il est possible d’espérer mieux ou plus ; ils essaient de combattre notre cynisme.

Ce combat contre la fatalité politique peut parfois devenir plutôt burlesque, pensons notamment à la confiance inébranlable de certains candidats en leur chance d’être élus.

C’est d’ailleurs le constat de notre impuissance qui fait que la stratégie prend autant de place, sous la forme du « vote stratégique ». C’est tout ce qu’il semble nous rester de notre pouvoir démocratique.

Tout se passe comme si l’élection était condamnée à la négativité ; celle de la réponse presque passive, celle du calcul, au stimuli du sondage. Cette année, la liberté politique semble s’incarner dans la possibilité de s’opposer.

Une conclusion

On vit donc, malgré tout, « quelque chose ».

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