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Chronique : Surtout pas

david lemelinDavid Lemelin (Photo : Courtoisie)

Par David Lemelin

« Il faut tout faire pour qu’une franchise de la LNH revienne à Québec, puisque c’est la seule solution qui permettrait à la Ville d’éviter de devoir rembourser le loyer du Centre Vidéotron à QMI Spectacles, année après année », nous dit Mélissa Coulombe-Leduc, conseillère de l’équipe du maire Marchand.

Bon…

Parfois, quand je regarde le conseil municipal, j’ai l’impression d’assister à une séance du parlement jeunesse : on sent une fierté naïve et approximative, à l’image de la maitrise générale des contenus.

Il y a certes des conseillers qui s’en sortent mieux que d’autres, dont Villeneuve, mais souvent les débats font soupirer plutôt qu’inspirer.

C’est exactement ce qu’on peut dire de la déclaration de la conseillère Coulombe-Leduc qui ramène le retour des Nordiques sur le tapis. Ce n’est pas méchant, remarquez.

Mais, de deux choses l’une : ou bien elle a exprimé une opinion personnelle avec un positivisme naïf ou bien c’est une ligne de parti.

Si c’est un message de sa formation politique, on peut facilement penser qu’on a décidé d’utiliser la « tactique Labeaume » qui consiste à s’acheter le soutien d’une partie importante des électeurs indéfectiblement amoureux des Nordiques, afin de diminuer la chaleur intense qui émane du dossier du tramway.

Ça a marché à merveille pour Régis en 2009 et en 2013. Pourquoi pas, alors, sachant que les prochaines élections seront tout sauf une partie de plaisir pour eux?

L’ennui, c’est que ce n’est même pas proche d’être le commencement du début d’une photocopie d’une bonne idée.

En vérité, ce que démontrent les études consacrées aux effets de la présence d’une équipe sportive, c’est qu’on s’en tire, au mieux, avec un effet nul. Au mieux!

On trouvera, certes, des exceptions, mais, en somme, un club professionnel fait entrer des sous, beaucoup, pratiquement autant qu’il en fait sortir (salaires très élevés, investissements colossaux, entretiens extrêmement coûteux, etc.).

Il ne se crée pas tellement de « dollars neufs », puisqu’on ne fait que déplacer une dépense qu’on aurait faite ailleurs, notamment dans nos commerces locaux. C’est ce qui explique qu’avec le départ des Nordiques, la région de Québec s’est, en réalité, renforcie, économiquement.

En science économique, on essaie aussi, autant que possible, d’établir la valeur des choses intangibles, comme la beauté d’un paysage (pour vrai!) ou le sentiment d’appartenance.

Dans le cas d’une équipe sportive, on peut en effet s’attendre à un effet bénéfique sur la cohésion, la fierté ou l’état d’esprit collectif. Mais, est-ce que ça peut justifier le risque?

Clairement pas.

Le sport professionnel est rendu à ce point exorbitant qu’il semble nécessaire au privé – comme c’est curieux – de se tourner vers les pouvoirs publics pour faire vivre leur rêve tout à fait privé, dont les retombées seront surtout sonnantes et trébuchantes dans les poches d’actionnaires dont le premier mérite ne sera pas de redonner à la collectivité. Socialiser les risques, privatiser les profits, souvenez-vous…

Pour s’opposer à cela, on pourra dire que nous n’avons pas les moyens d’avoir un club de la LNH. J’inviterais ceux qui croient que les gens de Québec ne sont pas assez riches pour remplir le Centre Vidéotron à se mettre à jour : il pousse des condos chers à tour de bras, l’économie régionale se porte bien… vous pouvez parier que ce serait plein, tout le temps, au moins durant les deux ou trois premières années.

Songez simplement que le Colisée de Québec était toujours rempli alors que les Nordiques croupissaient dans la cave du classement et que l’économie régionale n’était pas ce qu’elle est aujourd’hui.

Pas de doute : les fans sont très nombreux dans la grande région de Québec et iraient voir le hockey de la LNH, quoi qu’il en coûte.

En revanche, il est vrai que le privé, lui, n’a pas les reins assez solides pour s’offrir un luxe qui vaut, au moins, un demi-milliard. Même PKP et son empire n’y arriveraient pas seuls, nécessitant forcément le soutien d’un groupe aux poches profondes.

Est-ce que le contexte le permet, sachant que PKP se plaint constamment (à raison) des baisses de revenus de son empire médiatique et de la concurrence déloyale de Radio-Canada? (Moi, perso, ma télé publique, j’aime quand elle fait de la télé publique, pas du TVA 2.0 avec notre argent).

Bref, pour s’offrir la LNH, ça prend de la visibilité, des revenus juteux, un vaste public de consommateurs (oui, c’est que ça)… et ces astres sont plutôt alignés sur les géants du web qui tentent de mettre les gouvernements à genoux. Et ce n’est pas sur le web que PKP fait fortune.

Alors, non, le contexte n’y est pas. C’est pourquoi la tendance, lourde et paresseuse, consiste à se tourner vers le public pour siphonner l’État.

Or, si le privé se paye un club, avec ses seuls sous, qu’il nous fasse le bonheur de nous l’offrir et nous irons, avec joie. Et tant mieux si le propriétaire fait fortune : il y aura investi SON argent.

Mais, la Ville ne doit surtout pas tout faire pour qu’une franchise de la LNH revienne à Québec.

Tout faire?

Vous vous rendez compte de la formule? C’est le genre de message qui fait saliver le privé qui y voit un levier parfait pour du chantage : vous aviez dit vouloir tout faire?

Non. Surtout pas.

Le vrai problème, c’est le foutu contrat signé par un maire irresponsable, prêt à dire oui à n’importe quoi pour pouvoir se servir du « bonbon Nordiques » pour sa campagne de 2013.

On avait annoncé, à l’époque, que ce serait déficitaire sans club. On le savait. Mais, on était tellement certain qu’il allait revenir, notre club chouchou…

J’attends encore.

C’est le contrat, le problème, valide pour 25 ans. Québecor n’a eu que 33 millions à donner pour que l’amphithéâtre porte son nom et faire éponger 50 % de ses pertes d’exploitation par la Ville, jusqu’à concurrence du loyer annuel, soit 2,5 millions $ par an.

Et – surprise! – la totalité du loyer prévu au contrat a été remboursée à Québecor depuis l’ouverture de l’amphithéâtre. De leurs côtés, pour la construction du Centre Vidéotron, Québec a dépensé 200 millions, la Ville plus de 150… une vraie joke.

Donc, aujourd’hui et désormais, chers élus, prenez une respiration, avalez le morceau et ne répétez plus jamais que vous allez tout faire pour ramener un club.

Vous pouvez chercher des avenues pour rentabiliser l’éléphantesque aréna tout blanc. Mais, cette route ne doit pas conduire à se c… dans le ravin pour ravoir les Nordiques.

Surtout pas.

Et quand le temps sera venu de renégocier ce ridicule contrat (autour de 2036)… soyez plus sérieux et responsables que Labeaume.

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