Par Martin Claveau
Je vais toucher à une vache sacrée aujourd’hui. Je vais parler du partage de pistes cyclables et des trottoirs.
Pour ceux qui ne le sauraient pas, je suis un cycliste, souvent par utilité, mais aussi parce que j’aime ça faire du vélo comme loisir.
C’est un moyen de transport agréable et pertinent en plus d’être bon pour ma santé et pour la planète. En ville, plusieurs déplacements ont avantage à être fait en vélos, car c’est souvent plus rapide.
Cela dit, je ne suis pas, ce que l’on pourrait qualifier de « jusqu’au boutiste » du vélo. Je ne suis pas le genre à m’affirmer en roulant dans le milieu de la chaussée, au coin du boulevard Laurentien et de la rue de la Croix-Rouge, comme j’en vois certains faire parfois.
Souvent, dans des cas comme ça, je confesse que je préfère rouler sur le trottoir illégalement.
Je prends ma voiture souvent, pour des raisons diverses, alors je ne suis pas exemplaire en tout.
Ça fait de moi un genre de personne un peu hybride, dans ma façon de me déplacer pour certains, alors que d’autres me perçoivent comme un traitre et un agent double, à la solde du complexe militaro-pétrolier qui domine secrètement le monde, c’est selon.
Dans la portion cycliste de ma vie, je circule souvent dans les rues, les pistes utilitaires et celles plus récréatives.
Ma saison de vélo s’étire d’avril à novembre. Durant cette période, je partage les voies cyclables avec toute sorte de machins plus ou moins bizarres.
Je croise ainsi des trottinettes, des vélos, des unicycles, des roller-blades, des skateboards, des skis à roulettes, des triporteurs et parfois aussi des motos électriques qui ont l’air de Ninja 1600 « pimpées ».
Je croise aussi des gens qui marchent tout simplement et d’autres qui courent sur les pistes cyclables.
Tout ce beau monde se partage donc la chaussée réservée aux vélos. Mon constat ici est que cette cohabitation se passe, ma foi, plutôt bien en général.
Je vois rarement des accidents avec blessés qui impliquent un de ses différents modes de transport sur les voies cyclables et les trottoirs.
Par contre sur la route, où circulent des voitures et des camions, ils sont légion et je me sens souvent moins « safe » à bien des endroits.
Constatant ça, je pose une question qui me vaudra sans doute d’être désavoué par certains, qui me qualifieront de traitres, mais bon, je la pose quand même :
Est-ce que ça serait-ce si pire que ça si on faisait parfois passer des vélos sur les trottoirs, quand on manque d’espace sur des rues au lieu de vouloir toujours créer des espaces dédiés à tout prix et un peu partout?
Formulé dans une novlangue que ne renierait sans doute pas Éric Duhaime, on pourrait aussi dire : a-t-on vraiment toujours besoin de retirer des voies de circulation aux voitures pour que les vélos et ses dérivés puissent circuler?
Ne serait-ce pas souvent plus simple et sécuritaire de permettre qu’à certains endroits que le trottoir soit partagé entre différents usagers, plutôt que de l’écarter complètement comme c’est le cas présentement?
Certaines portions de rues sont extrêmement achalandés et ça ne changera pas de sitôt comme l’exemple que je donnais plus haut.
Il y a un paquet de places où je crois que ce ne serait pas si pire que ça et ça rendrait la pilule plus facile à avaler.
L’administration municipale a tendance à vouloir réduire la place des voitures en forçant les choses et ça révolte plusieurs automobilistes qui ont l’impression de perdre quelque chose.
Les cyclistes eux, ont souvent l’impression qu’ils ont droit à cet espace et qu’il leur est est dû.
Au-delà de la victoire des uns sur les autres, le but n’est-il pas simplement que plus de monde roule ou marche en bout de ligne?
Je me questionne de plus en plus sur pertinence de vouloir entrer ce genre de changements de force dans la tête des gens contre leur gré.
Quand tout le monde roulera ou marchera pour les bonnes raisons et non pas parce qu’on les force à le faire, les trottoirs et les pistes cyclables déborderont sans doute et on devra les agrandir, mais pour l’instant, on en est encore loin.
Je ne crois pas que de permettre qu’à certains endroits les vélos puisse rouler sur le trottoir nuise à la cause.
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