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À cônes impertinents, moteurs plus polluants

Quoi qu'on dise par Martin ClaveauMartin Claveau (Photo : archives Carrefour de Québec)

Récemment, à Montréal, on s’est aperçu que des cônes orange agrémentaient le paysage, depuis 16 ans, sans raison. Nous n’en sommes évidemment pas encore là ici, mais ça ne veut pas dire que l’utilisation de toutes ses joyeusetés qui accompagnent les travaux, n’est pas exagérée et qu’elle ne fait pas parfois l’objet d’un laisser-aller désespérant.

 Près de chez moi, dans le ghetto de Limoilou-sud, duquel sortir devient de plus en plus ardu, quand on a le malheur d’être en voiture, il est fréquent que l’on entrave les rues dans leur totalité pour des travaux qui n’occupent pourtant qu’une partie du passage. En plein jour, du lundi au jeudi, quand des ouvriers sont à l’œuvre, je comprends que cela soit justifié pour que ses derniers travaillent tranquilles. Là où je décroche, c’est lorsque les semaines de travail sont terminées et que ces entraves demeurent en place, même s’il apparait évident que le passage serait possible. Ça force un paquet de gens à faire de longs détours qui seraient, la plupart du temps, non nécessaires.

Souvent, un simple geste empreint de bon sens, comme de tasser deux cônes quand on termine, règlerait le problème.  Mais non, la plupart du temps, on laisse tout en place pour je ne sais trop quel prétexte bidon. Ça fait que, à la longue, ça donne l’impression aux gens, comme moi, qu’on se fiche d’eux comme de l’an quarante.

  Chaque fois que je me retrouve dans un nouvel épisode de ce mauvais feuilleton urbain, je répète la même chose dans ma tête: Que de temps perdu, que de moteurs qui tournent trop longtemps et que de kilomètres parcourus, pour rien, dans un quartier déjà trop pollué.

Je ne prétends pas être le détenteur de la vérité, mais il me semble que ça serait bien que la municipalité fasse en sorte que les voies de circulation soient circulable dès que c’est possible. Je considère même que ça devrait constituer une obsession, de maintenir la fluidité, à une époque où l’on ne parle que de mobilité. Quand je vois tous ces cônes et ces tréteaux qui demeurent en place inutilement, alors qu’ils ne protègent absolument personne, car personne ne travaille, des jours et des semaines durant, je me questionne sur la volonté communale de laisser les gens circuler près de chez eux.

Certains sont encore plus excédés que moi et se font parfois justice.  Ces gens se chargent de décoincer ces embâcles, las de faire des détours inutiles, alors que le chantier est en pause.

Au début juin, sur le pont Drouin, on a subtilement laissé des entraves en place par un beau jeudi soir. C’était possiblement le plus gros weekend de l’année sur la 3e avenue. Toutes les voies pour sortir de Limoilou par ce lien essentiel étaient, du coup, obstruées, forçant les automobilistes à faire un détour de 3 kilomètres, par Saint-Roch, pour sortir du ghetto. Après deux jours de ce régime circulatoire stalinien, un dangereux extrémiste se chargea discrètement de tasser trois cônes et le tour fut joué. Le passage s’ouvrit, telle la mer Rouge devant Moise et la circulation fut rétablie sur le pont. Cet afflux de bon sens au cerveau de notre vieille dame de ville intelligente ne dura toutefois que quelques heures. Un « casseux de party », sans doute à la solde de celle-ci, se chargea ensuite de replacer les damnés cônes qui avaient pourtant prouvés leur impertinence. Tout ça pour le plus grand déplaisir de tout le monde et plus particulièrement des gens de Saint-Roch qui virent le cortège d’exilés limoulois reprendre de plus belle.  

Récemment, comme ça, perdu dans le détour d’un chantier de construction à l’arrêt, par un soir de canicule, je réfléchissais à cette question existentielle.  Alors que je me disais que j’aurais probablement dû prendre mon vélo pour me rendre jouer au hockey à Saint Augustin, je dévisageais un de ces cônes qui me narguait de son impertinence au milieu d’une Xe chaussée bloquée inutilement.  Je songeai alors, ironiquement, que ces derniers ressemblent, en fin de compte, à autant de sabliers inversés qui nous font souvent perdre notre temps et qui contribuent à accroitre notre effet de serre en nous faisant faire à répétition des détours injustifiés.

 Je me disais aussi que ça ne serait pas un luxe de prendre le taureau de la mobilité par les licornes. Ça serait bien que quelqu’un fasse le ménage dans toutes ces entraves inutiles. Libérés du joug des cônes orange, je crois que nous serions collectivement plus heureux comme peuple.

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