Ursule à bascule : un album aussi poétique qu’actuel

Résidente et enseignante du quartier Saint-Sauveur, Carmen Duplain vient de publier Ursule à Bascule, son premier livre jeunesse aux Éditions Dent-de-lion, qui aborde avec poésie et profondeur la question de la santé mentale chez les plus jeunes.

Par Estelle Lévêque

Le premier album jeunesse de Carmen Duplain nous conte le rapport au monde d’une petite fille nommée Ursule. Submergée de pleurs dès sa naissance, l’enfant est inconsolable. Avec persévérance, ses parents trouveront des moyens plus qu’ingénieux pour répondre à son anxiété et encourager son bonheur, aussi fragile soit-il. Jusqu’à ce qu’Ursule découvre ce qui fera basculer son univers et lui apportera réponses et réconfort.

Écrire pour soi… et pour les autres

Enseignante à Québec depuis plus de 25 ans, Carmen Duplain n’a pas complètement quitté l’école Marguerite-Bourgeoys pour partir à la retraite. Passionnée, elle poursuit son parcours aux côtés des enfants en tant que suppléante et, désormais, à travers les pages d’un album jeunesse.

« Il y a un aspect créatif très important dans ma vie, qui se reflétait beaucoup dans l’enseignement. Aujourd’hui, je me suis dégagé de l’espace pour [développer cette fibre créative] dans d’autres contextes. »

Carmen Duplain, autrice de l’album jeunesse Ursule à Bascule.

En effet, même si elle a toujours écrit, principalement pour elle-même, Mme Duplain a vu son premier livre publié aux Éditions Dent-de-lion cet été. Bien qu’elle n’ait jamais eu l’ambition de faire éditer ses écrits, elle se réjouit de l’opportunité offerte par sa fille. « Elle m’a beaucoup encouragée à envoyer mes textes à des maisons d’édition. Je l’ai remercié, mais je n’ai jamais fait la démarche. Par contre, elle l’a fait », raconte Carmen Duplain.

Avant cela, l’autrice avait participé à des marathons d’écriture de 12h, notamment à la Maison de la Littérature. Ces expériences lui ont valu plusieurs publications en collectif.

Le miroir des inquiétudes

Dans Ursule à bascule, la jeune protagoniste manifeste de l’anxiété et un certain mal-être. Aux yeux de l’autrice, Ursule devient porte-parole, celle qui exprime sa part, qui résonne chez les autres.

« En tant que prof, j’entend de proche ce que disent les enfants, ce qui les touche, ce qui les marque, ce qui leur fait peur. Et ce qui me faisait beaucoup de peine, ces dernières années, c’est de constater à quel point leurs sentiments sont comme ceux des adultes. Ce sentiment qu’on est dans un début de fin du monde, que la planète ne nous survivra pas, qu’on est en train de tout saboter, que ça va mal, mal, mal. C’est quelque chose que les enfants reçoivent des adultes. »

Carmen Duplain, autrice de l’album jeunesse Ursule à Bascule.

Sensible, Carmen Duplain parle de ses élèves avec une grande empathie. Elle témoigne de l’anxiété qu’elle a observé chez eux et elles, au sujet de la crise climatique ou des pays en guerre.

Comme un miroir, elle dresse le personnage d’Ursule et apporte avec ses mots un réconfort à ce sentiment. « Je me souviens, à un moment donné de ma vie, avoir eu besoin de me rassurer. On a une impression de fragilité, mais on est quand même sur quelque chose de grand. Cette pensée-là, d’avoir l’univers qui nous porte, a souvent été salutaire quand je vivais des inquiétudes personnelles. Ça permettait de relativiser, finalement », commente l’autrice.

Représenter la diversité

Les éditions Dent-de-lion valorisent des personnages non stéréotypés, des quêtes narratives non genrées et travaillent pour donner lieu à une littérature jeunesse décloisonnée. Ainsi, au récit de Mme Duplain, qui mettait initialement en scène une famille traditionnelle, l’OBNL a proposé l’introduction d’un parent non-genré.

De cette porte ouverte, Carmen se réjouit et souligne la nécessité de créer une littérature jeunesse plus représentative de la diversité de la société. Elle témoigne d’ailleurs de la violence qui s’opère, encore, dans le cadre scolaire, et des rôles dans lesquels les enfants sont « tassés ».

Avec Ursule à Bascule, Carmen Duplain traduit en mots toute l’imagination et l’empathie qui émane de son expérience. Son récit est illustré par Alexa Perchemal, illustratrice de Montréal. Un lancement officiel de l’album aura lieu le 21 août à 15h, à la Maison de la littérature.