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De la pauvreté à la politique : le combat de Julie Vignola

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Dans une entrevue émotive accordée au Carrefour de Québec, la députée sortante de Beauport–Limoilou, Julie Vignola, est revenue sur son vécu personnel marqué par la pauvreté. Un parcours difficile qui continue de façonner ses actions politiques au quotidien.

Par Alexandre Morin

Certes, si la députée bloquiste se veut la porte-voix des intérêts du Québec à Ottawa, le fil conducteur de son engagement politique demeure la lutte contre les inégalités et la pauvreté.

Originaire de Sept-Îles et enseignante de formation, Julie Vignola a vécu la pauvreté dès son plus jeune âge. Adolescente, alors qu’elle résidait à Mont-Joli avec sa mère et sa sœur cadette, elle a rapidement pris conscience des sacrifices nécessaires pour assurer la subsistance familiale.

« Tsé moi, sauter des repas d’abord pour que ma mère et ma sœur mangent, puis ensuite de ça pour que mes enfants mangent toute la semaine, je l’ai fait. » Elle ajoute : « Au point où ce que moi je ne ressens pas la faim. »

« Je me souviens d’avoir mangé beaucoup de spaghetti à la soupe tomate […] je n’étais pas malheureuse. Probablement que ma mère, à cette époque, sautait des repas. »

Julie Vignola qui témoigne de son enfance.

Pour ne pas inquiéter sa mère, elle quittait la maison tôt le matin sans déjeuner. « Ma sœur était plus jeune, deux ans plus jeune, donc j’ai pris sur moi sans en parler à maman, je ne voulais pas l’inquiéter. Je sautais le déjeuner, je partais tôt pour l’école donc elle ne s’en rendait pas compte si j’avais mangé ou non. »

Replongée dans la pauvreté en tant que mère

Mère de quatre enfants, elle a de nouveau été confrontée à la précarité en 2007, alors que le poste qu’elle occupait dans le Kamouraska a été partiellement aboli. « Je n’y arrivais pas. J’ai vu la canne de bines à l’érable et au lard dans mon garde-manger. J’ai deux petits en bas de deux ans, puis j’ai deux grands, plus Pierre [le père] et moi. »

Elle se tourne alors vers Agir autrement et reçoit du soutien de Maryse, présidente à l’époque de Moisson Kamouraska.

« Ça a été des années difficiles. »

Mme Vignola le dit sans détour : elle a connu la pauvreté dans sa vie et en a surmonté les épreuves.

Julie Vignola se présente pour un troisième mandat dans la circonscription de Beauport–Limoilou sous la bannière du Bloc québécois. Enseignante de formation et députée depuis 2019, elle souhaite poursuivre son travail à Ottawa pour continuer à représenter les citoyens de sa circonscription et porter leur voix au fédéral (Photo: page FB Julie Vignola)

Un engagement politique ancré dans l’expérience

Ce vécu guide aujourd’hui son engagement politique. Militante convaincue pour la justice sociale, Julie Vignola avoue ne pas pouvoir retenir ses larmes face à la misère, notamment lorsqu’elle visite des organismes communautaires.

« Je me souviens d’une jeune, une jeune dame, une jeune maman. Toute bien habillée, puis elle pleure. » Après une longue pause pour contenir son émotion, elle reprend : « Elle pleurait parce qu’elle n’en revenait pas d’être rendue là, de ne pas être capable de nourrir sa famille. Tu t’attends pas à ça », confie-t-elle, émue aux larmes, en évoquant l’une de ses nombreuses visites dans les banques alimentaires de Québec.

« T’as des gens qui avaient des emplois hyper payants qui se retrouvent là aussi ».

Julie Vignola, députée du Bloc québécois dans Beauport–Limoilou

Ainsi, celle qui l’a vécu de près rappelle que personne n’est à l’abri de traverser des moments difficiles.

Elle souligne l’importance, selon elle, d’investir dans les services sociaux pour prévenir les conséquences sociales de la pauvreté, notamment la criminalité. « Lorsqu’on investit dans le social, ça retombe aussi en économie un moment donné. Parce que mieux que les gens sont, moins ils se préoccupent de leur sécurité, de leur logement, de leur vêtement, de leur nourriture, parce que c’est acquis. Plus ils se réalisent, et plus là, ta société dans son ensemble se réalise. »

Elle déplore l’écart entre les décideurs et la réalité de la pauvreté. « Il y a une gang de cuillères d’or qui sont à la tête du gouvernement pis qui savent pas c’est quoi avoir juste une canne de bines dans une armoire. »

Sur la question du tramway à Québec, Julie Vignola estime qu’au-delà des enjeux de mobilité, le projet comporte aussi une dimension de justice sociale.

« Le transport en commun est un moyen d’émancipation économique, qui permet d’avoir un meilleur accès à certains emplois, qui te permet d’avoir un meilleur accès aux études sans que ça te coûte le prix d’un char », explique-t-elle, ajoutant : « Ça coûte une beurrée, un char ! »

Un engagement pour tous

Julie Vignola transpose également ce désir d’égalité dans son action auprès des néo-Québécois. Pour elle, la lutte contre la pauvreté inclut aussi les personnes immigrantes qui s’installent à Québec.

« J’ai la chance de vivre au Québec, dans un pays extraordinaire […] Si je vivais dans un pays où les bombes peuvent me sauter sur la tête, puis qu’on me donne l’opportunité d’aller dans un pays où c’est qu’il n’y a pas de bombes qui te sautent sur la tête, qui le cave qui ne le ferait pas ? », demande-t-elle franchement, exprimant ainsi toute sa compréhension et son appui envers les immigrants, en particulier les réfugiés qui cherchent un refuge au Canada.

La bloquiste souligne toutefois que le gouvernement fédéral doit faire sa part pour assurer un accueil digne aux nouveaux arrivants. « Oui, on est généreux, mais la générosité, c’est pas de faire coucher le monde dehors », affirme-t-elle, en déplorant que le fédéral n’ait pas, selon elle, fourni les ressources nécessaires, notamment en matière de logement, pour soutenir convenablement l’arrivée des immigrants.

Elle est d’ailleurs particulièrement préoccupée par l’avenir des quelque 1200 dossiers d’immigration actuellement traités par son bureau. Elle craint qu’un changement de député freine ou complique le parcours des personnes qu’elle accompagne, puisqu’en l’absence de procuration, les informations personnelles ne peuvent être transmises à un successeur.

Cette incertitude la touche profondément.

« J’en reviens pas encore d’être où que je suis aujourd’hui », confie-t-elle.

« Je sais c’est quoi avoir juste une canne de bines pour six personnes dans la maison. M’a te dire que j’avais pas le goût de réaliser grand-chose à part de me rouler en boule puis de pleurer », confie-t-elle, pour illustrer à quel point elle comprend les réalités de la pauvreté — et combien, selon elle, une société qui investit dans sa population peut permettre à chacun d’aller plus loin.

Pour la députée bloquiste, la justice sociale est bien plus qu’un principe : c’est un moteur. Un moteur né dans l’adversité, qui continue de l’animer au quotidien.

Forte de son vécu et profondément engagée envers les enjeux sociaux, Julie Vignola souhaite poursuivre son travail à Ottawa pour continuer à défendre les citoyens de Beauport–Limoilou. Son expérience personnelle demeure au cœur de son action politique, guidée par le désir de bâtir une société plus équitable.

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