Ce dimanche 8 août à partir de 13h30 débutera l’édition estivale 2021 des Contes sur le parvis à la Maison de la littérature de Québec.
Nous avons eu la chance de nous entretenir avec le conteur Jacques Hébert qui ouvrira le bal ainsi que Maxime Plamondon qui présentera ses contes le 22 août. Isabelle Forest, responsable de la direction artistique et de la programmation de la Maison de la littérature, nous a aussi expliqué l’origine du concept.
Jacques Hébert : conter pour magnifier la vie quotidienne
Jacques Hébert, originaire de Lotbinière, affirme de prime abord que ses contes aspirent à conserver une mémoire du passé. C’est avec le décès de son grand-père que s’est érigé un refus de laisser les souvenirs et les histoires sombrer dans l’oubli.
« Une personne à elle seule ne peut pas tout sauver, avoue-t-il, moi ma contribution est de raconter des anecdotes qui suscitent des souvenirs chez les autres. »
« Je vois de la poésie dans les petites choses, explique-t-il, je les prends et je les magnifie. » Sa méthode comme conteur est de prendre des évènements anecdotiques de la vie quotidienne et de les rendre magiques par une mise en forme littéraire.
« Les gens sont contents de partager leurs anecdotes et de me raconter qu’eux aussi leur grand-mère leur faisait des toasts sur le poêle, poursuit Jacques Hébert, je peux servir de catalyseur pour que les gens se remémorent leurs propres souvenirs et les cultivent. »
Le site patrimonial du parvis de l’église joue aussi un rôle dans cette mise en scène de la mémoire. « Ce lieu est extraordinaire et il était autrefois un lieu de rassemblement, affirme Jacques Hébert, je le dis sans prétention, mais c’est un endroit où répandre la bonne nouvelle. Moi, la bonne nouvelle, je la répands par la bonne humeur et la joie. »
Le conteur explique en effet que son objectif, bien que ça puisse sonner « quétaine », est de partager la joie.
« L’humour est très présent dans notre société, mais sous forme acerbe et cynique », atteste Jacques Hébert. « La petite joie toute simple, faire sourire par une rencontre ou un moment ça fait partie de ce que je veux transmettre », indique-t-il.
Les Fables de La Fontaine l’ont marqué depuis son enfance et il s’en inspire pour ses contes, mais en laissant de côté la dimension moralisatrice. « J’écris beaucoup d’histoires qui servent à feeler mieux sans faire la leçon », précise-t-il.
« Le traditionnel et le folklore c’est ma base, poursuit-il, toutefois, j’incorpore des éléments plus urbains ou moins traditionnels si je trouve que ça ajoute à l’expérience imaginaire ou émotive. C’est donc un peu hybride ce que je fais. »
Par exemple, il raconte la neutralité et le dépassement de sa grand-mère face à la mort de son grand-père à l’époque, récit qui en laisse plusieurs avec la larme à l’oeil.
« Ce n’est pas une légende qui s’est passée il y a 500 ans, c’est ma grand-mère et moi, explique-t-il, on est pas dans la joie, mais on est dans l’affectif et le relationnel. » C’est pour lui en ce sens que ses contes ont aussi une dimension universelle. Ils visent à toucher le coeur humain, au-delà des référents culturels.
La place de la culture québécoise
Pour Jacques Hébert, il s’agit tout de même de « mettre en valeur le petit monde ». « On va apprécier des conteurs de d’autres pays, qu’on trouve exotiques et qui vont nous plaire, affirme-t-il, c’est parfait comme ça, mais il ne faut pas tourner le dos à une partie de nos origines comme québécois. »
Ces origines sont modestes : « C’était peu scolarisé, c’était peu éduqué, mais ça avait le coeur à la bonne place », exprime-t-il.
Au lieu de tourner le dos à ce qui représente dans l’imaginaire « la misère » ou « l’échec social de la vie rurale », Jacques Hébert veut revaloriser ce monde « sur lequel le Québec s’est construit et grâce auquel nous survivons ».
Conter, c’est aussi pour Jacques Hébert une manière d’assumer ses racines et de se mettre dans la peau de son père : « Lorsque je raconte, j’incarne le bonhomme qui raconte », révèle-t-il.
Ce qui est important pour lui est de créer un moment spécial avec les gens, dans la familiarité, le partage et la mémoire culturelle.
Maxime Plamondon : conter pour faire rêver
Maxime Plamondon, conteur, comédien et auteur, pratique le conte depuis une dizaine d’années.
« Moi, je suis dans un registre différent des contes folkloriques, explique-t-il, tous les contes que je fais sont des contes de créations, d’histoires que j’ai créées de toutes pièces. »
« Je dis à la blague au public que je m’intéresse aux affaires du ciel dans le sens où mes contes se passent dans l’espace et mettent de l’avant le rêve et le surréalisme », indique-t-il. Il a par exemple réécrit l’histoire de la Chasse-galerie, mais se déroulant en autobus du RTC.
« J’aime les récits qui dépaysent, une sorte de réécriture du quotidien », poursuit-il.
L’objectif de Maxime Plamondon est de « faire rêver les gens », de leur « faire envisager la vie quotidienne d’une manière « plus onirique » ou « plus éclatée ». « Si mes récits peuvent amener quelqu’un à rêver davantage ou à se réapproprier son environnement pour lui insuffler du rêve, je vais avoir réussi à le stimuler ou le motiver, à faire quelque chose d’intéressant », précise-t-il.
« Les Contes sur le parvis est un bel évènement pour ça parce que, puisque les contes changent et que les conteurs se renouvellent, le public peut ouvrir son imaginaire tout au fil du mois d’août », affirme Maxime Plamondon.
« C’est aussi l’occasion d’interagir avec les gens et de prendre le pouls, affirme-t-il, le public aime ça et revient. »
« Il y a un réel intérêt pour simplement le fait d’écouter dans une posture attentive et pas nécessairement d’assister à un évènement à grand déploiement, mais d’embarquer dans un univers qu’on souhaite découvrir », suggère-t-il.
Il propose d’ailleurs que le goût pour le conte vient du fait que « c’est un art lent, qui demande de la concentration » et qui se fait en « communion avec le public », à l’opposé du théâtre par exemple qui instaure une distance avec l’interprète. « Le public se retrouve aspiré par l’histoire, explique-t-il, et s’y ajuste. »
L’origine des Contes sur le parvis
Isabelle Forest, responsable de la direction artistique et de la programmation de la Maison de la littérature, explique qu’en 2018, l’évènement était plus comme de l’animation de rue.
« L’idée venait d’une volonté de souligner la fin des travaux de revêtement de l’église, trois ans après l’ouverture de la Maison de la littérature en 2015 », raconte Isabelle Forest.
« C’est un projet qui a été soutenu au départ par le volet patrimoine de la Ville de Québec, poursuit-elle, et j’avais demandé à Jacques Hébert de créer des contes inédits pour mettre en valeur le patrimoine de la Maison et d’inclure des commerces ou des entités importantes du secteur du Vieux-Québec. »
« Les gens pouvaient arriver au milieu de l’après-midi et attraper un bout de conte », explique Isabelle Forest.
« On s’attendait à avoir du roulement et à répéter les deux ou trois mêmes contes en boucle, raconte Jacques Hébert, mais les gens s’asseyaient et voulaient avoir un spectacle. »
« La réponse était au-delà de nos attentes », se rappelle-t-il.
« Maintenant, les gens peuvent rester durant les trois heures et entendrons des contes différents », indique Isabelle Forest.
« Les Contes sur le parvis présente une culture de proximité », explique-elle. « C’est une culture très ancrée dans l’actualité, poursuit la responsable, qui veut amener la magie dans le quotidien. »
Pour Isabelle Forest, il s’agit d’une mise en oeuvre d’un « réalisme magique » comme on trouve en littérature avec Gabriel García Márquez. « Ce réalisme on le trouve cette fois dans le conte et la formule de la tradition orale, mais actualisée », explique-t-elle. Elle donne l’exemple d’un récit qui reprend les normes du conte, mais qui se déroulerait à la Librairie Pantoute.
Les représentations sont de 30 minutes et sont présentées à 13 h 30, 14 h 15, 15 h et 15 h 45. L’évènement se déroule à chaque dimanche entre 13h30 et 16h15 jusqu’au 29 août.
Consultez la programmation ici.
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