Les guerres de juridiction entre les paliers de gouvernement, c’est classique. En général, c’est ennuyeux et ça nous donne l’impression de chicanes stériles. Il y a souvent plus d’orgueil que de bon sens au rendez-vous, plus souvent des calculs électoralistes qu’autre chose.
Par David Lemelin
Pourtant, ici, c’est de la sécurité des gens dont il est question.
Le 6 décembre de chaque année, le douloureux souvenir de la tuerie de l’École polytechnique de Montréal revient nous rappeler notre manque de sérieux, la petitesse des calculs politiques usuels.
Dans les médias, Nathalie Provost reste courageuse, même si elle admet que le manque d’ambition d’Ottawa ramène la peur dans son esprit. Elle sent qu’on est moins protégé qu’en 1989, elle qui avait été atteinte par les balles du tueur.
Cette phrase est lourde et grave.
Resserrer le contrôle? Oui, tout le monde semble d’accord. Mais, la responsabilité parait trop grande à porter. Pourtant, c’est au Fédéral que revient le contrôle des armes à feu, la responsabilité d’interdire l’entreposage des armes de poing, pas aux municipalités qui, d’ailleurs, n’en veulent pas. Pourtant, Ottawa s’entête, pour que la chaleur ne soit pas de son côté, mais chez les maires et mairesses.
Mais, comment assurer une cohérence, d’une ville à l’autre, d’un océan à l’autre, si ce n’est que par l’action d’Ottawa? On voudrait quoi? Plus de 1100 règlementations différentes au Québec? Et pourquoi les élus des petites villes devraient être moins bien servis que ceux des plus grands centres, qui disposent souvent de moyens plus importants? Même la mairesse de Montréal ne croit pas avoir les moyens de s’en charger. Imaginez les autres! Chose certaine, pour les élus municipaux, cette idée de « pelleter » la responsabilité dans leur cour est une (mauvaise) surprise, venue du champ gauche. Surtout qu’en toute logique, le contrôle des armes est notamment lié à la gestion des frontières, à la contrebande, au type de criminalité qui relève des compétences fédérales. Par souci d’efficacité, on devrait éviter de s’éparpiller.
Ce manque de sens des responsabilités a amené l’Assemblée nationale à réclamer qu’Ottawa délègue au gouvernement québécois le pouvoir d’interdire les armes de poing. Oui, d’accord. Ce serait, au moins, une façon d’obtenir une cohérence sur l’ensemble du territoire du Québec.
Programme de rachat obligatoire des armes d’assaut (parce que rendre l’utilisation illégale ne suffit pas. Comme si la personne mal intentionnée allait s’arrêter aux limites de la loi…), des lois plus sévères, un encadrement plus sérieux et cohérent, qu’on s’intéresse tant aux armes acquises légalement qu’illégalement, voilà ce que les milieux réclament.
C’est coûteux, tout ça? Oui. Mais, quel est le coût de la vie humaine? Vous vous dites que ça n’a pas de prix? Ce calcul a déjà été fait par des économistes, sachez-le. Et si c’était votre fille ou votre garçon qui mourrait sous les balles?
Il faudra quelques centaines de millions, dit-on, pour le rachat de toutes les armes? Et alors? La paix et la tranquillité d’esprit d’un peuple a un prix.
Pour ça, ça prend du courage politique. Or, de l’autre côté de la rivière des Outaouais, il y a pénurie, on dirait bien…
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