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Entrevue : La survivance du Parti Québécois

Paul St-Pierre PlamondonPaul St-Pierre Plamondon. Photo courtoisie.

La semaine a été plutôt difficile pour le Parti Québécois.

Commençant par « l’effondrement dans Marie-Victorin de la citadelle péquiste », se poursuivant par des caricatures dans les médias illustrant le « déni » de son chef, elle se termine par le constat de plusieurs sur le déclin presque inévitable du Parti Québécois.

Dans sa chronique pour le Journal de Québec, Marc-André Leclerc demande à Paul St-Pierre Plamondon s’il veut être le dernier chef du PQ, « celui qui fermera la lumière avant de quitter la salle ».

Nous avons donc demandé à PSPP lui-même si le PQ est aussi agonisant qu’on le laisse croire.

¨Êtes-vous d’accord avec le fait de parler de défaite dans Marie-Victorin ?

« Je demeure convaincu qu’il s’agit d’un très bon résultat dans les circonstances, parce qu’à environ 30%, on demeure très proche de la CAQ. Si ce même scrutin avait eu lieu il y a six mois, tout le monde s’entendait pour dire que ça aurait été une victoire beaucoup plus nette.

Ça nous place comme le seul parti qui est capable de battre la CAQ. C’est un bon résultat avec un bon candidat et une bonne campagne. C’est ce qu’on veut mettre de l’avant.

On fait face à un gouvernement qui a une forme d’arrogance en raison des sondages qui ont été toujours en haut de 40% depuis des années, mais qui gouverne à coup de sondages à court terme et en fonction du sujet du jour.

C’est vraiment un gouvernement dépourvu de vision, de cohérence et très déprimant sur les questions qui structurent notre avenir. Si le plan en français est insuffisant pour renverser le déclin du français au Québec et que celui en environnement est insuffisant pour stopper le réchauffement climatique… Il y a un moment où il y a un espace pour un parti qui a une vision et des réponses pour ces questions à long terme.

Notre force pour 2022, c’est qu’il n’y aura de d’opportunisme au Parti Québécois. C’est des gens qui sont-là par conviction, qui sont vrais, ce qui a beaucoup de valeur parce qu’on ne peut pas dire ça de la CAQ. »

Comment vous expliquez-vous donc le succès de la CAQ ?

« Un facteur important est la surexposition de la CAQ et du premier ministre dans les médias. Quand tu regardes le temps d’antenne, il occupe depuis maintenant deux ans à peu près 70% de l’espace. Un parti comme le PQ va aller chercher 9-10%.

La surreprésentation lui permet d’installer son narratif qui est un substitut aux faits, à la réalité. Est-ce que les faits ont autant d’espace que le narratif imposé par le PM ? C’est le plus gros défi de tous les partis d’opposition.

Ce qui me préoccupe c’est que chaque parti soit considéré au mérite de ses idées et de ses candidatures et non pas en fonction d’une spéculation constante à coup de sondages. C’est un enjeu démocratique. »

Considérant cette nature imparfaite de la joute politique, comment allez-vous tirer votre épingle du jeu ?

« C’est notre défi. On est un parti humaniste, bienveillant et un peu idéaliste. Ça demeure un acte d’espoir de croire qu’après plusieurs générations, il y aura une justice et qu’on aura un pays comme tout le monde. Ça nous rend moins intéressés au superlatif du jour.

Dans l’environnement et les médias sociaux, c’est une logique de clic. La meilleure recette c’est de dire une ânerie ou un mot de trop. En même temps, c’est ce qui fait que plein de citoyens débarquent de la démocratie. C’est un dilemme éthique pour un parti qui veut faire un pays dans le cadre duquel on vit mieux.

Je ne suis pas particulièrement un gars polarisant non plus. Je ne suis pas en politique pour polariser. »

Pourtant, l’indépendance est la question qui a peut-être le plus polarisée les Québécois.

« Pas en ce moment. »

Que pensez-vous du travail de la CAQ par rapport aux intérêts nationaux ?

« La CAQ invite les Québécois à un déclin en douceur, à une forme d’aveuglement volontaire sur tout ce qui ne va pas dans le Canada. De ce point de vue, elle est identique au modus operandi du Parti libéral du Québec sous Couillard ou Charest.

Mais ils ont le mérite de faire certaines demandes et des énoncés de surface pour que les Québécois trouvent un peu de fierté. Quand on voit les échecs s’accumuler, on constate qu’ils font le choix de mettre la nation sous le tapis, choix qui semble convenir à plusieurs Québécois qui n’ont pas envie de regarder la réalité en face : notre déclin linguistique, environnemental et économique.

Je suis toujours inquiet de voir un gouvernement être populaire lorsque sur les gros sujets les réponses sont à l’évidence insuffisantes. L’absence de contrôle sur un paquet de dossier : culture, immigration, frontières, etc. Quand ton plan c’est de taire ces problèmes parce que ton image c’est celui d’un gouvernement fort et nationaliste, c’est inquiétant.

L’avenir de l’indépendance, c’est de démontrer le courage et le sens de la vérité pour que ça devienne contagieux.

De quelle manière peut-on enthousiasmer les électeurs à la cause de l’indépendance ?

« Il y a énormément d’arguments concrets quant au déclin du Québec dans le Canada : la santé des gens, l’environnement, les finances, la langue. Depuis deux ou trois ans, ce qui me frappe c’est à quel point l’actualité nous a donné plein d’exemples criants de la nécessité d’avoir notre propre pays. »

Est-ce une urgence que le Québec devienne souverain ?

« Oui c’est une urgence. L’idée d’indépendance est de retour : on la voit chez des bénévoles de 14-16 ans qui débarquent. Donc ce moment n’est pas si loin. Dans l’histoire de l’indépendantisme, il ne faut pas perdre de vue que des fois, il y a beaucoup de preuves que c’est nécessaire, mais ça en prend une qui est symbolique pour que les gens disent « ça suffit ».

On peut appeler ça un catalyseur. Dans n’importe quel mouvement social il y a un point de bascule. C’est certain qu’un contexte pandémique a mis ces questions en suspens. Maintenant si on regarde la prochaine élection, il y a un seul parti qui porte vraiment cette idée, bien et avec honnêteté.

La question qui va se poser est : est-ce qu’on s’assure de la continuité et de l’espace suffisant pour le parti indépendantiste qui agit en chien de garde, en surveillant d’un autre parti qui est beaucoup plus affairiste ? »

On voit aussi des jeunes se rallier à QS parce que l’indépendance y est pensé moins comme une fin, mais comme un moyen pour avoir plus de justice sociale ou une meilleure défense de l’environnement.

« On a le même discours utilitariste, mais nous on considère l’indépendance comme une finalité au niveau de la justice au terme d’un parcours historique : jamais on entendra QS parler de ça.

La vérité c’est que Québec solidaire, si on observe dans un cas très concret comme Marie-Victorin, Gabriel Nadeau-Dubois et Manon Massé n’ont jamais parlé d’indépendance. Ils ont dit être la seule alternative progressiste.

Ils ne peuvent pas vraiment porter l’indépendance parce que d’un sondage à l’autre, il y a entre 50 et 55% des gens qui votent QS qui sont en fait fédéralistes et ils le savent. Moi en élection je vais en parler de l’indépendance. Je n’essayerai pas d’opposer une génération contre l’autre.

Le PQ a une mentalité beaucoup plus universaliste à tous les niveaux : celui de l’identité, mais on a aussi besoin de parler à toutes les générations et au plus grand nombre possible.

La plus grosse différence c’est qu’on n’est pas dans le clivage. Le clivage permet d’obtenir de la visibilité. Si tu es en politique pour que le pays ait lieu, tu es obligé de te priver de la polarisation à outrance. »

À ceux qui disent que le Parti Québécois est en train de mourir, que répondez-vous ?

« Ça fait plusieurs années qu’on accole constamment le narratif de la mort du PQ et c’était le cas avec un PQ à 25% dans les sondages. L’objectif est d’évacuer le contenu, les idées et les personnes avec une forme de prophétie auto-réalisante. Tu le répètes tellement souvent que ça produit des résultats.

Mes prédécesseurs l’ont vécu, je le vis aussi. Ma réplique jusqu’à maintenant c’est des candidatures de qualité et des idées de qualité. Mon espoir c’est qu’on soit jugé en fonction de notre mérite et non en fonction du mépris. Malheureusement, depuis la défaite référendaire, c’est comme si le mépris est accepté socialement lorsqu’il est question du PQ et je fais un lien avec le Québec bashing.

J’ai le sentiment que les Québécois qui reçoivent difficilement le Québec bashing le transfèrent sur le PQ qui est l’épicentre de l’identité québécoise comme héritier non seulement de Parizeau, Lévesque et Bouchard, mais comme héritier des patriotes. C’est la même démarche.

Je pense que comme à notre habitude, on va amener des candidats et des idées de qualité et en élection les gens vont faire « c’est vrai que c’est bon ». Pour reprendre le cas Marie-Victorin, je pense qu’on peut agréablement surprendre tout le monde. C’est comme ça dans plein de circonscriptions.

On offre quelque chose qui est l’antidote à ce qui est dérangeant avec la CAQ. Tout ça va entrer en ligne de compte. C’est comme ça que je vois la prochaine élection. »

1 commentaire sur "Entrevue : La survivance du Parti Québécois"

  1. Hugues Yves St-Pierre | Avr 15, 2022 at 16 h 15 min | Répondre

    Et Yves-François, le laisseriez-vous prendre votre chaise?… si le peuple l’acclamait?…

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