En voilà un autre qui quitte le navire de Québec d’abord. Claude Lavoie, conseiller de Saint-Rodrigue, est le troisième à traverser de l’autre côté de la salle du conseil. On lui aurait promis un poste à l’exécutif… ou peut-être pas. Il l’aurait peut-être demandé. Faut voir.
Par David Lemelin
Alors, vous vous dites : « est-ce si payant ou attrayant, membre de l’exécutif, pour être aussi convaincant auprès de l’opposition? »
Ça dépend de ce que vous considérez comme une « offre que vous ne pouvez pas refuser ».
Un conseiller municipal gagne 67 367 $ à la base, mais peut atteindre 102 873 $ s’il est membre de l’exécutif à plein temps. Ça peut être tentant. Mais, en étant président d’arrondissement, Claude Lavoie gagne déjà ce salaire.
On pourra noter au passage l’habileté du maire à attirer des gens de son côté pour affaiblir ses adversaires. C’est vrai. Mais, ce n’est pas ce qui me frappe le plus. Des tractations du genre, il y en a toujours eu, que ce soit au municipal, au provincial ou au fédéral. La question est la suivante : le candidat qui se présente en portant un programme, des valeurs et des idées le fait-il juste pour « le fun »?
C’est une vraie question.
Les gens de St-Rodrigue n’ont pas élu un membre de QFF. Ils ont élu un représentant de l’opposition. On pourra nuancer en rappelant le taux de participation anémique et le reste, mais il n’en demeure pas moins que la volonté démocratique a envoyé un conseiller d’opposition à l’hôtel de ville. Pas un membre du parti au pouvoir.
C’est cool pour QFF, c’est plus facile pour assurer la gouverne. Mais, est-ce qu’on ne balaie pas du revers de la main un peu facilement ce que la population a dicté?
C’est mon avis.
Claude Lavoie n’avait pas envie d’y penser avant? On dirait bien que non. Alors quelle raison sérieuse explique cette défection? Climat interne? L’envie de « bâtir »? Car, ce n’est pas comme si l’opposition faisait la pluie et le beau temps, comme s’il s’agissait d’une opposition destructrice et fermée d’esprit. Au contraire, l’opposition à la Ville de Québec est dans une approche plutôt constructive, collabore facilement et s’oppose en général à des trucs évidents (à part Québec 21 qui se montre plus créatif, c’est vrai, en matière d’opposition sans motif).
Alors, en quoi c’est plus payant, démocratiquement, de traverser du côté du pouvoir? Pour faire avancer des dossiers? Vraiment?
Je ne suis jamais impressionné quand un député ou un conseiller change de camp. Il n’y a que les fous qui ne changent pas d’idée, c’est vrai. Et je ne crois pas que l’on ne doive jamais changer d’équipe. Seulement, je m’interroge sur les circonstances de celle-ci, sur le contexte, qui ne permettait pas de conclure à l’obstruction systématique. Bruno Marchand ne joue pas ce jeu de dispute continuelle contre l’opposition… ce qui ne l’empêche pas d’essayer d’affaiblir ses adversaires. Je n’y vois pas plus de pertinence, pour les raisons invoquées précédemment : ça roule déjà assez rondement et ça respectait la volonté démocratique.
Alors, pourquoi? En tout cas, l’effet ne peut que contribuer au cynisme des électeurs qui peuvent légitimement se demander à quoi ça rime de voter.
Pendant ce temps, le chef de l’opposition, Claude Villeneuve, essaie d’avoir l’air zen, malgré tout. C’est bien essayé. Mais, cette nouvelle est effectivement terrible pour lui, égratignant en cela sérieusement son leadership. Lui qui se prépare pour la mairie dans 4 ans subit par ces départs des coups de hache profonds dans le personnage « présidentiable » qu’il essaie de sculpter.
En vérité, ça fait mal. À l’orgueil, sans doute. Mais, je ne crois pas que la démocratie soit mieux servie par ces élus dont la fidélité est pour le moins discutable.
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