Par David Lemelin
Quel est le vrai problème avec le troisième lien?
Au-delà de tout argument que l’on pourrait sortir à propos de sa pertinence ou pas, de ce qu’il en coûterait, le problème le plus important et le plus grave, à mon sens, est la volonté d’utiliser ce projet comme jouet électoral.
Pour moi, tout est dans cette phrase.
C’est exactement la même analyse que l’on peut faire concernant l’amphithéâtre. En 2013, quand je circulais de porte en porte dans la ville, bien des gens me disaient vouloir le retour des Nordiques. Alors, je répondais chaque fois : « vous réalisez qu’ils ne reviendront pas, hein? »
Et, chaque fois, on me disait se douter qu’ils ne reviendraient pas, mais qu’on préférait ne pas prendre de chance en votant pour Labeaume. « T’à coup y’arrive à nous les ramener! »
Je les attends encore.
Labeaume avait, à ce moment, choisi de proposer un projet irréaliste et irresponsable, uniquement appuyé sur les sentiments des gens de Québec.
J’avais beau expliquer que ça n’arriverait pas, que l’amphithéâtre serait vide et déficitaire… ça n’a ébranlé personne. J’avais raison (comme bien d’autres qui l’ont dit), mais ça ne m’a rien rapporté.
Ainsi, pour un machiavélique déterminé, l’amphithéâtre est un autre de ces exemples qui prouvent qu’il peut être payant de flouer les électeurs. Si tant est que la victoire soit la seule chose qui compte pour vous.
La CAQ est exactement dans cette dynamique. À l’époque, c’était promettre de l’asphalte, promettre 100 000 jobs… aujourd’hui, c’est un tunnel à chars. C’est ainsi. Ils promettent un truc débile, simplement par calcul électoral.
Je n’en veux pas aux gens de croire le gouvernement. J’en veux à ce gouvernement de proposer quelque chose qu’il sait incohérent, inutile, mal avisé, appuyé par aucun expert, bref de proposer un gouffre financier qui nuirait aux collectivités de Québec et Lévis, pour le simple plaisir d’engranger des votes.
C’est profondément honteux et inacceptable. Sur les plans éthique et moral, c’est bas. Désirer le pouvoir au point de forcer chaque candidat à répéter en ayant l’air sérieux que le troisième lien est une bonne idée, même si on leur fait remarquer qu’ils ont dit le contraire le mois d’avant. C’est ça, le pouvoir. C’est ce à quoi il conduit.
Aujourd’hui, on voit bien que la CAQ se prépare à prendre la voie d’évitement. Ils savent que le troisième lien est intenable, financièrement. Québec n’a pas les reins assez solides pour se le payer seul.
C’est l’unique raison qui explique la migration de la CAQ vers le transport collectif dans son projet à deux tubes. Elle a besoin de l’argent du fédéral.
La vice-première ministre a beau « rappeler », sans rire, que l’objectif du troisième lien est « d’avoir une offre de transport collectif de centre-ville à centre-ville qui actuellement n’existe pas », on sait qu’il s’agit-là d’une blague. Ça n’a jamais été l’objectif.
L’objectif était de gagner des votes. À présent, voyant que la CAQ tient bon dans les sondages, ils se sentent assez confortables pour reculer et, éventuellement, enterrer le projet. Perdre quelques sièges dans la région n’enlèvera rien à la CAQ. Ils resteront largement majoritaires, même en proposant des solutions médiocres.
Car, c’est le pouvoir qui compte. Toujours.
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