Le théâtre musical La Corriveau – la soif des corbeaux retrace les faits historiques qui ont donné naissance à la célèbre légende. Il sera présenté à la salle Albert-Rousseau les 6 et 7 juin prochains.
Par Estelle Lévêque
Un an après sa première représentation de La Corriveau – la soif des corbeaux, le théâtre de L’oeil ouvert part en tournée pour l’été au Québec. Il sera présenté à la salle Albert-Rousseau les 6 et 7 juin prochains.
Jade Bruneau, metteure en scène du spectacle et interprète de la Corriveau, nous parle de cette œuvre, de son écriture à son aboutissement flamboyant sur scène.
De l’Histoire à la légende
Quelle vision aviez-vous, au départ, de l’histoire de La Corriveau et comment celle-ci a-t-elle évolué au fil de la création du spectacle ?
Jade Bruneau : Très peu de gens connaissent la vraie histoire La Corriveau. Moi, comme tout le monde, je connaissais l’histoire de la sorcière qui a tué ses sept maris de sept façons différentes. Quand on s’est mis à réfléchir à une nouvelle idée de spectacle, on cherchait un sujet autour de la culture québécoise qui nous permettrait d’aborder le sujet de la violence conjugale.
Geneviève Beaudet (co-auteure avec Félix Léveillé) a rappelé que la Corriveau était une histoire vraie, qui abordait ce sujet, en plus d’être une légende. Alors, on s’est replongé dedans et on a découvert le superbe livre La Corriveau: de l’histoire à la légende, de l’historienne Catherine Ferland.
C’est donc cet ouvrage qui vous a permis de démêler le vrai du faux, les faits historiques de la légende ?
Jade Bruneau : Oui. Ceci dit, encore aujourd’hui, on ne sait pas exactement ce qui est vrai et ce qui est faux. On s’est inspiré de ce qui a été étudié par des gens bien plus outillés que nous. Après ça, il y a des choses qu’on a ramassé, transformé, simplifié, gardé floues, même. Je dirais qu’on est à mi-chemin entre le true crime et la fantaisie. Tout ça, dans une actualité très féministe, engagée, moderne. On a vraiment joué avec ces différents univers.
Mise en scène et création
Vous êtes à la fois l’interprète de la Corriveau et la metteure en scène. Comment s’est créé le spectacle en collaboration avec les auteur.e.s ?
Jade Bruneau : On travaille souvent de façon collective, donc très étroitement avec les auteurs, compositeurs et concepteurs. C’est vraiment Félix et Geneviève qui ont écrit le texte. Moi, mon travail, c’était de les nourrir, de les challenger, de leur poser des questions ; de les accompagner, en somme.
Par la suite, j’ai fait le pont entre les auteurs et la compositrice, Audrey Thériault. On s’est interrogées sur plusieurs aspects : Comment transformer ce monologue-là en chanson ? Comment composer autour de telle scène, qui est vraiment écrite comme une chanson ?, etc.
Enfin, il s’agissait de monter le spectacle dans l’espace en intégrant les mouvements, les chorégraphies. À ce moment-là, pour embrasser complètement mon rôle de metteure en scène, j’ai engagé une autre comédienne pendant les répétitions qui jouait mon rôle, afin de me concentrer sur la mise en scène.
Qu’est-ce qui vous a donné envie d’accorder une si grande place à la musique et à la chanson ? Qu’est-ce que ça apporte à une pièce de théâtre ?
Jade Bruneau : Je crois que ça change tout ! Personnellement, en tant qu’interprète et metteure en scène, c’est vraiment le pluridisciplinaire qui m’intéresse. Je crois que, par les mots, on peut toucher un certain public et par le mouvement, un autre. Par la musique, on véhicule des choses qu’on ne véhicule pas par le mouvement. C’est la combinaison du théâtre, du chant, de la musique, du texte, de toutes ces formes d’art qui permet de s’adresser à toutes formes de personnalités.
Aussi, je crois que, dans le cas de la Corriveau, on avait une occasion en or de rendre plus facile l’adaptation de cette histoire au théâtre. Sans diminuer le propos ou le rendre plus léger, il y a quelque chose dans la musique qui donne un effet plus grand, qui appelle à l’action.
Musique, costumes et décors
Musicalement, le spectacle joue beaucoup des anachronismes ; le folklore québécois côtoie le rap, la musique épique, les numéros à la Madonna. Est-ce la même chose au niveau des décors, des costumes ? Visuellement, où nous emmène la pièce ?
Jade Bruneau : Comme pour le texte ou pour la musique, on a vraiment choisi de se positionner dans un genre de no man’s land. On ne voulait pas être trop dans une époque du terroir, ni dans une modernité extrême un peu froide, très léchée. Dans les costumes, on a une touche de l’époque dans les coupes et les silhouettes des personnages. En revanche, les tissus utilisés sont très contemporains avec du jean, du cuir.
Aussi, on a des projections des visages des acteurs en très gros plan, dans une esthétique très différente de leurs costumes. Elles nous donnent plus accès à qui seraient ces personnages de nos jours. Parce que, des Corriveau modernes, il y en a plein. Des maîtres corbeaux modernes, des femmes qui sont one of the boys, il y en a plein aussi.
Le décor est noir, très épuré et se transforme par la lumière, qui découpe les lieux. Tout est une question de nuances poétiques dans cet espace. Il est simple, et en même temps complexe et audacieux dans la proposition. Il laisse aussi toute la place aux acteurs pour faire des fresques, des tableaux, des chorégraphies.
La Corriveau – la soif des corbeaux sera présenté à la salle Albert-Rousseau les 6 et 7 juin. Suivre le lien suivant pour rejoindre la billetterie.
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