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Chronique : Une chronique dépassée?

david lemelinDavid Lemelin (Photo : Courtoisie)

Par David Lemelin

Ils sont présents sur nos ondes depuis des décennies. Ça n’empêche pas de se poser la question : le chroniqueur à la circulation à la radio sert-il encore à quelque chose?

C’est une vraie question! Suivez-moi sur le chemin pas trop congestionné de ma réflexion…

J’ai animé des bulletins de nouvelles, animé à la radio, à la télé, pendant des années. Je connais le métier de l’intérieur.

Je me suis toujours demandé si on ne faisait pas un peu toujours les mêmes choses, par réflexe, en évitant de se poser la question sur la pertinence de ceci ou cela. Un chroniqueur à la circulation, il en faut un, voyons!

Honnêtement? Je pense que c’est surtout pour avoir l’air de rendre service aux gens. Dans les faits, déterminez-vous vraiment vos parcours en fonction du gars qui se promène comme il peut dans une ville trop grande pour une émission de radio?

Pas moi.

Le GPS de mon cellulaire est, on va se le dire, mille fois plus précis et sur la coche que Marc-André et compagnie, malgré leur bonhomie et la meilleure volonté du monde.

Je n’attends pas qu’il parle du bout de rue ou de la route dont j’ai précisément besoin. Mon appli ne me fait pas attendre.

D’ailleurs, souvent, au moment où le chroniqueur aborde une difficulté, elle a déjà évolué. Le bouchon s’est dissipé, la voiture a été dégagée… bref, le bordel n’est plus. Il nous invite à éviter un secteur strictement pour rien.

À une autre époque, la chose se faisait en hélicoptère. C’était beaucoup plus précis.

Depuis plusieurs années, le chroniqueur se promène en voiture et cueille les infos provenant du public. Une pratique qui a de sérieuses limites.

C’est pour ça que je me suis toujours demandé si le chroniqueur n’avait pas avantage à « beurrer épais », question de mousser l’intérêt et l’importance de son segment radio. Car, très souvent, c’est bien moins pire que ce que l’on dit.

Je ne dis pas que c’est aisé! Mais, la fin du monde n’est souvent pas sur la 40 Est à la hauteur de Saint-Jacques ou sur le pont direction sud. C’est pénible, certes, mais pas infernal.

Et puis, prenons un pas de recul, dira le piéton, pour nous demander si le chroniqueur à la circulation ne nourrit pas, sans s’en rendre compte, l’impression qu’un troisième lien autoroutier est indispensable à notre survie collective.

Certes, les gouvernements ont à peu près oublié le projet (sauf les conservateurs, mais quand on traine un programme parfait pour 1953, faut pas s’étonner), mais combien, dans leur voiture, en plein bouchon, se disent encore aujourd’hui que « ce serait dont bin pratique d’avoir un maudit troisième lien pour que je sorte d’ici (ajoutez ici les sacres qui vous conviennent) ».

La science est claire : un lien autoroutier empire la situation. Vraiment. C’est de la pensée magique et un mensonge complet.

Néanmoins, quand vous entendez Marc-André vous dire que « c’est actuellement l’enfer à l’entrée des ponts »… ça vous crinque, non? 

Surtout, la chronique à la circulation tourne encore et toujours autour de l’auto. Comme si l’univers du transport se limitait à la voiture en solo. La chronique ne devrait-elle pas, si on tient à la conserver, aborder la mobilité plus largement?

Par exemple, à CKIA le matin, l’animatrice suggérait des parcours de bus, les corridors vélos à envisager, etc. Ça me parait nettement plus 2023 comme approche, non?

Est-ce qu’on n’y verrait pas là une manière de nourrir le changement de culture de société dont nous avons, en réalité, bien plus besoin que l’autocentrisme qui nous caractérise encore?

Vous voyez, ma réflexion est moins légère qu’elle n’y paraissait, non?

Et puis, tant qu’à y être, apprenez-vous vraiment le temps qu’il fera en écoutant la chronique météo? Moi non plus.

Je ne crois pas que ce soit utile dans un bulletin de nouvelles. Les données boursières non plus, d’ailleurs. Les gens qui vivent des résultats de la Bourse les savaient bien avant qu’ils n’apparaissent à l’écran de Bruno.

Là, vous vous dites : si on enlève la circulation, la météo, les indices boursiers… ils vont parler de quoi?

Des nouvelles. Ils vont trouver des nouvelles. C’est pour ça qu’on les écoute ou les regarde. C’est pour ça qu’on les paye.

Quoi que, perso, je n’écoute pas souvent. Je suis surtout un lecteur.

Ça m’évite ainsi d’avoir à me taper le « plaisir » factice pour faire sympathique qu’on nous vend souvent, dans les formats traditionnels à la radio ou la télé. Vous savez, le genre de moment où le « fun » en studio sent la comédie forcée à plein nez?

Oui, comme par exemple, quand le journaliste dit à l’animateur, alors qu’en studio ils reçoivent la pâtissière du quartier, qu’il va reprendre une part de la succulente tarte aux bleuets qu’on leur a offerte et que l’animateur lui répond : « oh, vous mon grand fou! » avec l’équipe qui se force à rire en chœur, pour réagir à un gag sans intérêt…

Quand je lis, ça m’évite ces malaises.

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