Ce texte a été écrit en réaction au projet Immobilier de l’îlot Dorchester par un collectif de citoyens de la basse-ville qui s’oppose à celiu-ci. Il n’engage évidement pas l’équipe du journal, mais nous considérons tout de même qu’il est important que les citoyens puissent s’exprimer dans nos pages.
Dimanche après-midi à l’îlot Dorchester. Des personnes de tous les âges sont rassemblées dans la fraîcheur du printemps. Le groupe bigarré est un peu à l’image de Saint-Roch, avec sa diversité et sa mixité sociale. Si ces gens sont réunis à cet endroit, c’est pour en revendiquer un autre usage. L’immense stationnement est appelé à se transformer.
Le propriétaire du terrain, le groupe Trudel, a son projet. Celui-ci ne fait pas l’affaire, comme en témoigne la forte mobilisation contre ce chantier. Nous sommes en fait de plus en plus nombreux·ses à nous y opposer. La proposition défendue par le promoteur et par l’administration municipale n’est tout simplement pas à la hauteur.
Un projet d’un autre siècle
Prenons par exemple l’angle de l’adaptation aux changements climatiques. Cet enjeu devrait hors de tout doute être au cœur de chaque projet pensé à notre époque. Autrement, nos enfants puis leurs enfants en payeront lourdement le prix.
Or, que nous propose-t-on comme élément phare de l’îlot Dorchester ? Une énorme boite de verre. L’été, celle-ci devra être climatisée abondamment pour ne pas se transformer en serre. L’hiver, il faudra beaucoup de chauffage pour la rendre habitable, puisque la vitre n’a qu’un faible pouvoir isolant.
Pour ce qui est du verdissement, nous aurions droit à une quinzaine de feuillus en pleine terre, un effort louable, mais franchement insuffisant. Ce ne sont pas quelques toitures vertes qui viendront compenser, d’autant plus que celles-ci demanderont un entretien extensif pour être viables. Et évidemment, elles ne seront pas accessibles pour la très vaste majorité des gens du quartier.
Il nous faut de toute urgence une autre approche du développement, une autre vision de l’urbanité. Il n’est plus question d’agir comme nous l’avons fait au 20e siècle. La ville de Québec a été victime d’une succession de mauvaises décisions qui l’ont défigurée. Saint-Roch en a particulièrement subi les conséquences, notamment avec la construction de l’autoroute Dufferin-Montmorency. Celle-ci a entrainé la destruction de pans entiers de la basse-ville, dont le quartier chinois, qui n’a laissé que peu de traces. Nous ne pouvons pas nous permettre de reproduire de telles abominations, qui mènent chaque fois à une plus grande exclusion de personnes marginalisées.
Défendre le cœur de la ville
Nous devons à tout prix respecter le tissu urbain en place pour préserver l’échelle humaine et bonifier le vivre-ensemble. Pour nous, qui habitons déjà le quartier, et pour les personnes qui s’y établiront dans le futur.
Cela passe par une réponse adéquate à la crise de l’abordabilité du logement. Ce n’est pas en agrandissant le parc locatif privé avec de nouveaux appartements hors de prix que nous pourrons remédier à cette problématique. La seule solution est de prioriser le logement social. C’est d’ailleurs une aberration qu’un lot aussi vaste n’accueille aucun véritable logement social, qui par définition est une propriété collective.
Un emplacement si central dans le noyau même de la ville représente une opportunité extraordinaire. L’aménagement de ce lieu devrait être pensé au bénéfice de toustes. La proposition actuelle du groupe Trudel démontre la pauvreté de l’imagination des promoteurs, qui ne pensent qu’en termes de rentabilité.
De notre côté, nous sommes porté·es par notre esprit de communauté et par l’amour que nous éprouvons pour nos quartiers. Non, le vent ne viendra pas s’engouffrer entre nous. Non, nous ne serons pas plongé·es dans l’ombre. Non, nous ne serons ni Manhattan, ni Dubaï, ni Tokyo. Nous continuerons de faire front ensemble pour préserver le caractère de notre ville, car c’est cela même qui définit notre qualité de vie. Nous nous serrerons les coudes, et notre voisinage restera notre fierté.
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